«Nous ne pouvons agir (en Syrie) que dans le cadre de la légalité internationale», a soutenu François Hollande, mercredi dernier, après avoir estimé que la France avait «apporté des éléments de preuve» sur l'utilisation de gaz sarin en Syrie «qui obligent la communauté internationale à agir». Les Etats-Unis tempèrent et veulent plus d'éléments avant de prendre toute décision. Nous avons fait notre devoir, devoir de vérité, car nous avions les éléments qui maintenant permettent de donner la certitude de l'utilisation – à quel niveau ? Nous ne le savons pas encore – des armes chimiques en Syrie», a déclaré, mercredi, François Hollande. «Je confirme que nous avons reçu les informations envoyées par les Français», a indiqué la porte-parole du département d'Etat, Jennifer Psaki, alors que le Quai d'Orsay a annoncé jeudi avoir transmis aux Etats-Unis «toutes les informations» dont il dispose sur le recours à du gaz sarin en Syrie. Laurent Fabius a remis, mardi dernier, un dossier technique à Ake Sellstroem, un scientifique suédois chargé par les Nations unies de conduire une mission en Syrie sur les armes chimiques, considérant que la France a fait le seul choix qui était moralement acceptable. Les options à prendre suite aux révélations françaises sur l'utilisation par le régime syrien de gaz sarin dépendront des réactions internationales, indique Paris. Mais la Maison-Blanche, qui veut plus d'éléments «avant de prendre une décision», préfère temporiser pour l'instant, sa priorité semblant être la conférence de Genève dont Washington est un des initiateurs avec la Russie. Pour les Français, les deux actions ne sont pas antinomiques. «Je noterai que selon les informations françaises (...), davantage de travail reste nécessaire pour établir qui est responsable de l'utilisation (de gaz), quelles quantités ont été utilisées et recueillir davantage de détails sur les circonstances de leur utilisation», a indiqué Jay Carney, porte-parole de la Maison-Blanche. «Comme le président l'a dit, nous devons augmenter le faisceau des preuves en notre possession (...) avant de prendre une décision, nous devons pouvoir les examiner, nous devons pouvoir les recouper avant de prendre une décision sur la base de la violation très claire que le recours à des produits chimiques représenterait de la part du régime syrien. Nous allons persévérer», a encore dit le porte-parole américain. Washington préfère temporiser Paris considère que Washington ne ferme pour l'instant aucune porte et que toutes les options sont sur la table. Les Russes n'ont pas encore réagi. Les Britanniques ont accueilli positivement la publication par la France de ces résultats. «De manière concertée, nous travaillons avec nos partenaires et quand je dis nos partenaires, c'est, comme traditionnellement les Américains, les Britanniques, mais aussi les Russes. Les Russes ont déclaré qu'ils considéraient de manière générale que l'utilisation des armes chimiques était inacceptable», a indiqué Laurent Fabius sur France 24. «En révélant la vérité, c'est-à-dire que Bachar Al Assad est à l'origine de ce drame de l'utilisation des armes chimiques, c'est une pression que nous exerçons sur Bachar Al Assad et ceux qui le soutiennent», a ajouté le chef de la diplomatie française. Quant à la possibilité d'une éventuelle utilisation d'armes chimiques par des groupes d'opposition, Laurent Fabius (sur France 24, mercredi) l'a écartée en affirmant qu'«il n'y avait aucune attestation de cela, mais notre condamnation des armes chimiques c'est pour tout le monde, ce n'est pas seulement pour Bachar Al Assad. En l'occurrence c'est pour Bachar Al Assad, contre lui et nous disons que ce type de pratique est inacceptable et donc il faut que là-dessus des pressions soient exercées à la fois pour qu'il rende des comptes et qu'il n'utilise plus ces armes». Et d'ajouter que pour la résolution du conflit syrien, «autant nous travaillons (avec tous les partenaires) pour aller vers une solution politique, autant sur le terrain il faudrait que les choses soient rééquilibrées», en référence à la situation militaire des protagonistes et à leurs moyens militaires. Jusqu'au 1er août, date de la prochaine réunion des ministres des Affaires étrangères européens – suite à celle du 27 mai qui avait abouti à la levée par les 27 de l'embargo sur les armes –, la France n'en fournira pas à la rébellion. Sur la conférence de Genève, les Français n'ont de cesse de dire que le préalable de Genève 2, c'est Genève 1. Soit qu'il faut qu'il y ait un gouvernement de transition composé de part et d'autre par consentement mutuel doté de tous les pouvoirs. Ce qui signifie que ce gouvernement de transition aura de fait les pouvoirs de Bachar Al Assad. «Nous nous sommes mis d'accord là-dessus, ce qui nécessite de part et d'autre un certain nombre de concessions», indique Laurent Fabius, qui rappelle que les Russes sont engagés par Genève 1, la différence entre les parties est dans la lecture des résolutions de Genève 1 et que «nous essayons de faire en sorte que chacun soit représenté et que la conférence puisse aboutir». Bachar Al Assad va-t-il rester au pouvoir jusqu'à la fin de son mandat en 2014 ? La question ne se pose plus de manière aussi tranchée, mais Paris soutient qu'il ne peut faire partie de la solution. Pour la première fois, le gouvernement syrien est officiellement invité à participer à la conférence de Genève – qui devrait se tenir en juillet –, de même que l'opposition lors de la réunion préparatoire tripartite qui s'est tenue mercredi au siège des Nations unies à Genève, regroupant autour de l'émissaire spécial des Nations unies et de la Ligue arabe, Lakhdar Brahimi, le vice-ministre russe des Affaires étrangères, Mikhaïl Bogdanov, et la sous-secrétaire d'Etat américaine, Wendy Sherman.