La France a accusé mardi le régime de Bachar al-Assad d'avoir utilisé à au moins une reprise du gaz sarin en Syrie, soulignant que "toutes les options sont sur la table", alors que Washington a demandé davantage de preuves. "Nous n'avons aucun doute sur le fait que les gaz ont été utilisés (...). La conclusion du laboratoire est claire : il y a du gaz sarin", a affirmé sur la chaîne publique de télévision France 2 le chef de la diplomatie française, qui a évoqué des échantillons provenant de journalistes du quotidien Le Monde après une attaque mi-avril à Jobar, en banlieue de Damas, ainsi que d'une autre source qu'il n'a pas précisée. "Dans le deuxième cas, il ne fait aucun doute que c'est le régime et ses complices puisqu'on a l'intégralité de la chaîne, depuis le moment où l'attaque a lieu, le moment où les gens sont tués, où on a les prélèvements et où on les fait analyser", a expliqué Laurent Fabius. Selon une source diplomatique, ce cas précis concerne une attaque d'hélicoptères du régime qui ont largué des munitions à Saraqeb, dans le nord-ouest de la Syrie, le 29 avril. Les échantillons analysés étaient de l'urine et du sang. D'autres échantillons prélevés dans d'autres lieux sont en cours d'analyse dans le laboratoire français agréé. La France est le premier pays à se montrer aussi catégorique quant à l'utilisation d'armes chimiques en Syrie, régulièrement évoquée depuis plusieurs mois et dont les Occidentaux, Barack Obama en tête, avaient fait une "ligne rouge", avant de se montrer plus prudents. "Il y a une ligne qui est franchie incontestablement. Nous discutons avec nos partenaires de ce qu'il va falloir faire et toutes les options sont sur la table. Ou bien on décide de ne pas réagir ou bien on réagit, y compris d'une façon armée, là où est produit, où est stocké le gaz", a souligné M. Fabius, avant de nuancer en disant : "nous n'en sommes pas là". Selon la source diplomatique, une saisine du Conseil de sécurité de l'ONU est envisagée, lorsque la mission d'enquête mise en place par le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon, mais qui n'a jamais été autorisée à aller en Syrie, rendra son rapport intérimaire, probablement avant la fin du mois. Les résultats des analyses françaises ont été remis mardi matin au professeur Ake Sellström, le chef de cette mission, afin d'être versés au dossier. Toutefois, reconnaît-on à Paris, une preuve "irréfutable" pour l'ONU est une preuve recueillie sur le terrain par un enquêteur onusien. "Il faut à la fois réagir et en même temps ne pas bloquer la conférence éventuelle de la paix", a souligné M. Fabius, faisant allusion à la conférence "Genève 2" dont Washington et Moscou ont pris l'initiative pour ouvrir des négociations entre les belligérants syriens. Une réunion préparatoire tripartite ONU/Russie/Etats-Unis consacrée à cette conférence est prévue pour mercredi à Genève. La Maison Blanche a aussitôt réagi aux accusations de Paris, considérant que davantage de preuves étaient nécessaires. "Il nous faut enquêter davantage (...). Davantage de travail reste nécessaire pour établir qui est responsable de l'utilisation (de gaz), quelles quantités ont été utilisées, et recueillir davantage de détails sur les circonstances de leur utilisation", a jugé le porte-parole de Barack Obama, Jay Carney. Washington et Moscou ont été prévenus lundi matin du résultat des analyses de Paris, a-t-on précisé au Quai d'Orsay.