Les invités d'hier au forum d'El Moudjahid, à l'initiative de l'association le Flambeau du chahid, n'ont pas souhaité se prononcer clairement sur le harcèlement judiciaire que subit ces dernières années la presse en Algérie. Interrogé pour donner son avis sur l'emprisonnement des journalistes, l'universitaire Zoheir Ihedaden a eu, après hésitation, comme réponse : « Je me suis éloigné de la politique. » L'orateur dit, toutefois, avoir constaté depuis longtemps « beaucoup de dépassements » dans l'écrit journalistique. Ce qui justifie, à ses yeux, les sanctions prononcées contre les journalistes. « A partir du moment où il y a des calomnies, il y a des sanctions », a-t-il estimé. De l'avis de cet universitaire, « on a libéré la presse de façon anarchique ». L'orateur lie l'évolution de la presse à celle de la démocratie qui n'est pas, selon lui, tout à fait complète en Algérie. Zoheir Ihedaden, intervenant auparavant sur le rôle de la presse au cours de la guerre de libération, s'est attardé sur les notions de « l'information » et de « la propagande » qu'il faudrait, selon lui, distinguer par leur différence. « Au cours de la période coloniale, c'était la propagande qui a été utilisée pour tromper l'ennemi », a-t-il souligné. La propagande a été utilisée pendant cette période comme arme de combat. A ses yeux, « l'utilisation de la propagande pendant la guerre de libération était obligatoire ». Zoheir Ihedaden regrette, toutefois, que des journalistes recourent encore aujourd'hui à ce moyen pour informer le citoyens. « Les partis politiques qui ont des visées politiques bien précises peuvent verser dans la propagande, mais les journalistes ne doivent pas utiliser ce moyen pour informer l'opinion publique », a-t-il estimé. Zahia Ben Arous (ex-présentatrice du JT à l'ENTV et sénatrice du RND), qui a pris le soin de préciser qu'elle ne s'est pas spécialisée dans le journalisme, s'est permise de qualifier le travail actuel de la presse d'« anarchie ». Mais celle-ci a été vite rappelée à l'ordre par un de nos confrères, Abdelkader Harichène en l'occurrence, pour lui dire que « c'est vrai qu'il y a des dépassement, mais pas de l'anarchie ». Celui-ci constate également « l'absence d'activité syndicale dans la presse ». Zoheir Ihedaden estimera par ailleurs, contrairement à ce que pense Zahia Ben Arous, qu'« il n'y a pas de pluralisme d'idées à la télévision algérienne, celle-ci est toujours au service du pouvoir ». Zoheir Ihedaden pense que « le droit à l'information est aujourd'hui un leurre ». Il estime que le citoyen n'est pas suffisamment informé. Il regrettera qu'il y ait des mesures du code de l'information de 1989 qui n'ont jamais été appliquées. « Il faut faire la différence entre la démocratie et l'anarchie », dira Mohamed El Mili, ex-ministre, qui a rappelé les différentes étapes par lesquelles est passé le quotidien El Moudjahid. « El Moudjahid est passé par plusieurs déstabilisations, mais la liberté des journalistes était toujours restée en marge », a-t-il relevé.