Obama a appelé Morsi hier et le chef d'état-major US a contacté, lui aussi, son homologue égyptien. La feuille de route américaine est en marche… C'est aujourd'hui qu'expire l'ultimatum de 48 heures donné par l'armée égyptienne au président Morsi pour satisfaire les revendications du peuple. Sous réserves des résultats de la réunion, hier soir, entre Mohamed Morsi et le chef de l'armée, le général Abdelfattah Al Sissi, le compte à rebours pour le départ du Président semble avoir commencé. Et pour cause, la Présidence a rejeté hier l'ultimatum des militaires, affirmant dans un communiqué que «l'Egypte ne permettra absolument aucun retour en arrière, quelles que soient les circonstances». Une preuve que Morsi et ses Frères ne sont pas prêts à «écouter le peuple» comme le lui avaient recommandé le général et même Barack Obama. L'ultime réunion d'hier devait sans doute servir de dernière tentative de trouver un compromis pour éviter une reprise du pouvoir musclée par l'armée. A l'heure où nous mettions sous presse, rien n'a filtré de ce tête-à-tête entre le président Morsi et le général Abdelfattah Al Sissi.Sur le terrain, le pronostic vital du régime des Frères musulmans semblait, hier, bien engagé. Aux cris de «Dégage» et «Le peuple veut la chute du régime», la foule a déferlé à travers toute l'Egypte à l'appel du mouvement d'opposition Tamarod (rébellion), avec le soutien de nombreuses personnalités. L'opposition politique au président Morsi s'est même engagée dans l'après-Morsi en désignant Mohamed El Baradei comme sa «voix» et son négociateur en vue d'une «transition politique». Tout en se défendant d'appeler à un coup d'Etat, l'opposition ne s'est pas empêchée d'annoncer sa «confiance» en l'armée. «Nous ne soutenons aucun coup d'Etat militaire», assure le Front du salut national (FSN), principale coalition de l'opposition. Morsi, un président seul Dans le camp de Morsi, le bateau commence lentement mais sûrement à se vider. Les démissions de ministres se poursuivent en cascade. Hier, c'est le ministre des Affaires étrangères, Mohammed Kamel Amr, qui a rendu le tablier après le départ lundi de ses quatre collègues du Tourisme, de l'Environnement, des Communications et des Affaires juridiques et parlementaires. Pis encore, la saignée a même touché l'entourage immédiat du Président avec la démission, hier, des porte-parole de la Présidence et du gouvernement. Et pour boucler la boucle, la justice a ordonné le même jour la réintégration du procureur général limogé en novembre par décret présidentiel. Un désaveu net et sans bavure au président Morsi. C'est donc un Président isolé dans son bureau qui a dû accueillir le chef de l'armée – remise au goût du jour – dans l'espoir de trouver une issue de secours qui pourrait sauver sa tête. Ultime tête-à-tête Pas sûr que cet ultime conclave serve à quelque chose. L'armée a, en effet, commencé à fuiter les détails de la feuille de route qu'elle appliquera, faute d'accord entre les différentes forces politiques du pays à la fin de l'ultimatum qui expire ce soir. L'armée égyptienne prévoit de suspendre la Constitution, de dissoudre le Parlement et de confier le pouvoir à un «conseil intérimaire» majoritairement civil, si le président Mohamed Morsi et l'opposition ne parviennent pas à un accord de partage du pouvoir avant l'expiration de son ultimatum, ont indiqué des sources militaires. La rencontre entre Morsi et le général Abdelfattah Al Sissi a dû être inspirée par les Américains qui s'inquiètent de la situation en Egypte. En effet, le président Barack Obama a téléphoné, hier, à Mohamed Morsi pour l'inviter à répondre aux revendications des manifestants, selon un communiqué de l'ambassade américaine au Caire. De son côté, le général Martin Dempsey, chef de l'état-major américain, est également entré en contact avec son homologue égyptien. Ces deux appels téléphoniques en provenance de Washington ne sont certainement pas étrangers à cette rencontre non prévue du président Morsi avec le chef de l'armée égyptienne. Faut-il rappeler que ce fut l'amiral Mike Mullen, le plus haut gradé de l'armée américaine, qui avait sifflé en 2011 la fin de la «récréation» pour le président Moubarak. L'histoire semble se répéter deux années plus tard.