Le théâtre pragois (Tchéquie) Nablizko a pour le moins séduit le public Béjaoui avant-hier. Les membres de la troupe ont dit pour leur part avoir été émus par la réaction du public, agréablement surpris. Soirée réussie donc après quelques appréhensions liées au caractère unique, en Algérie, de l'expérience proposée et de l'aspect aventure de la virée pour la jeune troupe tchèque. Le Tigre de Tracy, une pièce de William Saroyan, a été présentée au Théâtre régional de Béjaïa (TRB), dans le cadre de la 7e édition du Festival culturel européen, dont les concepteurs ont, cette année, voulu un peu sortir de la capitale est étendre l'activité à l'intérieur du pays. La représentation, qui s'est déroulée en présence de son Excellence l'Ambassadeur de la République tchèque, Milan Sarapatka, a été rendue possible par l'implication active de l'association Etoile culturelle d'Akbou qui a pris en main l'aspect organisationnel de la manifestation. La troupe, la seule en Europe à prévoir et présenter des versions destinées également au public sourd-muet. L'« interprétation de l'ombre », est en effet une technique qui veut rendre possible l'assimilation d'une pièce par un public qui intègre la catégorie des sourds-muets. L'on a eu en quelque sortes à suivre un spectacle joué par deux troupes parallèles, l'une l'interprétant dans la langue « dite » et l'autre, aussi consistante, presqu'aussi vivante sur les planches, traduisant le tout dans le langage des signes. Le personnage est double en effet, et les comédiens évoluent en paires puisque un traducteur ou traductrice, de la Chambre tchèque des interprètes du langage des signes, colle comme une ombre à ceux qui ont le privilège de la voix et de l'articulation. L'on ne s'apercevra que rarement que les planches sont exceptionnellement grouillantes car, en fait, la pièce n'est pas seulement traduite dans le langage des signes mais jouée carrément dans le langage des signes, avec comme confluents des expressions l'autre langage commun, les expression du visages, les poignées de mains, les traits de l'affliction... La catégorie des sourds-muets, des enfants et des jeunes issus des associations spécialisées de la ville d'Akbou et de Béjaïa a formé une bonne partie du public. C'est celle qui a donné l'air d'être la plus ravie, celle qui s'est montrée la plus démonstrative en marques de satisfactions. C'est la première fois que le théâtre n'oublie pas de s'adresser à eux.