A l'évidence, le ministère de la Culture se préoccupe beaucoup du désert culturel qui envahit le système scolaire. Il multiplie les actions en direction de l'école. En 2005 déjà, un accord bilatéral était signé avec son homologue de l'Education nationale et qui porte sur la redynamisation des bibliothèques des écoles. Nous ne savons pas si des fruits ont été récoltés suite à cet accord, une année après. Un début de réponse nous est donné par M. Benbouzid qui a déclaré, la semaine passée : « moins de la moitié des établissements sont dotés de bibliothèques. » A voir l'amertume des deux ministres, celles existantes sont loin d'être opérationnelles. En mars 2004, une mission d'études américaine avait touché du doigt la misère qui frappe les bibliothèques scolaires en Algérie et s'était promis d'aider à renverser cette vapeur anesthésiante. Deux années sont passées et le constat sur ce point précis rejoint celui établi il y a de cela plusieurs années : le livre (et la lecture) a trouvé à l'intérieur des enceintes scolaires, une sépulture de choix . Et dire que dans les pays qui se respectent, l'école est l'espace/tremplin idéal où se dessine une véritable politique du livre. Dans leurs établissements scolaires, les bibliothèques sont des carrefours de la connaissance et de véritables ruches. Point besoin de motiver avec de l'argent pour amener les élèves à lire....ce qui les attire le plus. Après l'illettrisme scolaire, voilà que le département de Khalida Toumi se propose d'apporter son concours pour insuffler un mouvement de réhabilitation des activités culturelles. Le challenge est ardu quand on connaît la lourdeur de l'organisation pédagogique (les programmes et les emplois du temps) qui caractérise nos établissement scolaires. L'épreuve du terrain Nos élèves ne connaissent des activités culturelles que ces gesticulations folkloriques bricolées à la hâte à l'occasion d'événements ponctuels (les fêtes religieuses et nationales). L'état d'esprit qui prévaut au sein des établissements reste moulé dans une vision archaïque de l'éducation. Il ne milite pas en faveur de cette redynamisation, à moins d'un électrochoc. L'éducation artistique et l'EPS ont, de tout temps, été marginalisées. Elles étaient même déclarées « haram » par les gardiens du temple des constantes nationales. Il n'y a qu'à voir les horaires et les moyens qui leurs sont dégagés. Dérisoires ! La demande formulée par le ministère de la Culture de faciliter l'accès des établissements scolaires aux spécialistes de son secteur pourrait changer la donne. L'apport des professionnels fera que ces activités culturelles et artistiques ( théâtre, musique, peinture, danse chorale ....) ne sortiront pas de leur vocation première. Elles seront gérées en fonction d'objectifs techniques et éducatifs. Ce qui les éloignera du bricolage occasionnel voire des tentations de manipulation. Les enseignants d'éducation artistique, ces « raseurs de murs », seront les premiers à saluer cette initiative. Ils auront à cœur de montrer leur savoir-faire et de profiter de l'expérience des intervenants. Ces derniers pourront susciter des aspirations auprès des autres enseignants qui chercheront à se former aux techniques artistiques, chacun selon ses penchants. Les professeurs de lettres (arabe, français et anglais) auront l'opportunité de bonifier leur pratique pédagogique en s'initiant au théâtre par exemple. Sésame de l'efficacité et de l'harmonie didactico-pédagogiques, l'interdisciplinarité se verra matérialisée dans la réalité du vécu scolaire des élèves. L'animation culturelle, corollaire de l'éducation artistique et de l'EPS, sera le point de rencontre de toutes les disciplines scolaires. La coopération entre les enseignants ne sera plus un vain mot. Les bénéficiaires ? Le climat d'ensemble au sein de l'établissement, les relations de travail, la motivation des élèves. Les spécialistes ont de tout temps souligné le double impact positif des activités culturelles et artistiques sur le rendement : au niveau de l'élève et au niveau de la classe. C'est pour avoir compris ce rôle de stimulant joué par l'éducation artistique (et de l'EPS) que certains pays - les anglosaxons - ont valorisé leur statut dans leur organisation scolaire. Chez eux, ce sont toutes les après-midi de la semaine qui leurs sont consacrées. Et ils ne s'en portent pas mal puisqu'ils présentent les meilleurs résultats scolaires au monde. Peut-on rêver de voir un jour les élèves algériens envahir les musées, les salles de théâtre, les conservatoires de musique et les galeries de peinture en tant que consommateurs et plus tard producteurs ? Encore faudrait-il que la surcharge en activités intellectuelles leur soit diminuée et que l'angoisse du bachotage ne soit plus de mise. La culture à l'école relève beaucoup plus d'une transformation des mentalités : rompre avec la conception dépassée de l'école/arène de combat et de concurrence.