Depuis la première opération de recensement, les familles syriennes en déplacement à Béjaïa refusent de donner leurs noms et le nom de leur pays d'origine aux membres de l'association préférant garder l'anonymat et essayer de survivre par leurs propres moyens. Une dizaine de familles syriennes qui ont fuit la guerre dans leur pays d'origine vivent depuis des mois dans la précarité à Béjaïa. Contraintes à la mendicité dans les mosquées de la ville, leur condition ne semble pas du tout s'améliorer à l'approche de l'Aïd. Le Croissant Rouge Algérien, l'une des plus importantes organisations humanitaires qui active à Béjaïa, affirme qu'il est difficile de leur venir en aide tant que le statut de «réfugiés» ne leur a pas été reconnu par l'Etat algérien. «Le terme réfugié ne s'applique pas à ces familles car ce terme implique que le gouvernement algérien leur a accordé ce statut conformément aux conventions internationales», a déclaré Omar Bessaad, le président du bureau de wilaya du Croissant Rouge Algérien. Selon lui, la reconnaissance de ce statut est une condition initiale qui permettra au CRA de participer dans la prise en charge des ces personnes tombées dans la précarité en fuyant leur pays en guerre, comme dans le cas des programmes lancés par le CRA pour la prise en charge des réfugiés sahraouis au sud. «C'est une décision politique qui va engendrer beaucoup d'autres responsabilités», a-t-il précisé. La plupart de ces familles sont en situation régulière avec un titre de séjour qu'elles renouvellent. «Néanmoins le CRA a pris en charge les familles venues de Syrie en mettant à leur disposition trois sites au moins, à Alger et à Boumerdès mais certaines familles refusent de se rendre sur ces sites d'hébergement», a-t-il ajouté. Ces familles qui préfèrent garder leur liberté et survivre par leurs propres moyens sont contraintes à la mendicité pour survivre, notamment durant le mois de ramadan. Ce sont les mosquées de la ville de Béjaïa qui constituent leur destination favorite, comme la mosquée Al Kawthar d'Aâmriw ou celle d'El Khemis où ces familles guettent les nombreux fidèles ou passants pour demander l'aumône. Selon certains témoignages recueillis dans la ville de Béjaïa, la situation des familles syriennes se dégrade de jour en jour. Trouver une location est quasiment impossible, avec les tarifs exorbitants appliqués dans l'ex capitale des Hammadites. Des cas de femmes célibataires qui se proposent en mariage pour échapper à cette situation d'extrême précarité ont également été rapportés à Béjaïa. D'autre part, ces familles se font de plus en plus discrètes et refusent de s'identifier pour ne pas être contraintes à être renvoyées dans les sites d'hébergement. «On a entamé une opération de recensement à travers la wilaya, il y a une année et nous avons recensé cinq familles mais peu de temps plus tard elles ont disparu. À partir du moment où on les a identifiées, elles quittent la wilaya pour disparaître de peur d'être forcées à rejoindre les sites d'hébergement», a rapporté Omar Bessaad en précisant qu'en l'absence du statut juridique de réfugiées, le CRA ne peut aider ces personnes qu'à leur demande et doivent d'abord s'identifier. Selon notre interlocuteur, depuis la première opération de recensement, les familles syriennes en déplacement à Béjaïa refusent de donner leurs noms et le nom de leur pays d'origine aux membres de l'association préférant garder l'anonymat et essayer de survivre par leurs propres moyens. Une décision qui complique leur situation davantage et rend difficile toute aide officielle de l'Etat ou des associations humanitaires. Leur survie devient alors entièrement dépendante de la générosité des habitants. «Durant le mois de ramadan, les restaurants Errahma leur permettent de rompre le jeûne dans des conditions acceptables mais à long terme, leur situation risque de se dramatiser davantage», a estimé Omar Bessaad qui cite des exemples d'autres réfugiés africains. Par ailleurs, le CRA a reconduit, cette année encore son programme traditionnel d'assistance aux familles nécessiteuses de la wilaya de Béjaïa, durant le mois de ramadan. Cinq restaurants Errahma ont été ouverts sur le territoire de la wilaya, à Akbou, El Kseur, Seddouk, Oued Ghir et Tichy. Des opérations de circoncision au profit des enfants démunis ont été programmées en plus de l'habituelle distribution de couffins de ramadhan. Durant la journée de l'Aïd, des visites sont prévues par les bénévoles du CRA dans les hôpitaux et les centres pour personnes âgées.