En s'opposant à la révision du code de la famille, les partis islamistes, et à leur tête le MSP, s'inscrivent à contre-courant des réalités d'un pays où les femmes ont conquis de nombreux et importants espaces de libertés dans divers domaines de la vie économique et sociale. Aidées en cela par la démocratisation de l'enseignement et l'ouverture économique, les Algériennes sont en effet de plus en plus nombreuses à intégrer le champ des élites à la faveur d'un cursus scolaire prolongé ou d'un parcours professionnel couronné de succès. Les Algériennes qui, au lendemain de l'indépendance, étaient pour la plupart analphabètes et généralement cloîtrées dans leurs foyers, sont aujourd'hui légions dans les secteurs de l'enseignement, de la médecine et de la justice, bien souvent aux postes les plus élevés de la hiérarchie : maîtres de conférences, maîtres assistantes, chefs de services médicaux, présidentes de cours, juges, etc. Elles sont également nombreuses dans les partis politiques et les organisations non-gouvernementales où elles occupent des postes clefs. L'association des femmes algériennes entrepreneurs (SEVE) nous apprend que les femmes chefs d'entreprises sont aussi de plus en plus nombreuses (plus de 400 ont été recensées) et le nombre d'Algériennes qui créent leurs propres entreprises (environ 5000 en 2003) ne cesse de croître, aidées en cela par les dispositifs étatiques d'aide à la création d'entreprises (ANSEJ, ANDI, CALPI). Si la percée des femmes est largement perceptible dans pratiquement tous les secteurs de la vie économique et sociale, y compris l'armée où l'on compte déjà bon nombre d'officiers supérieures, c'est surtout dans les professions médicales qu'elles se sont distinguées de façon magistrale. Une étude que l'on doit à Fatma Zohra Oufreha, spécialiste des questions de santé et d'économie sociale, nous apprend statistiques à l'appui que les différents corps des professions médicales sont aujourd'hui à plus de 50% tenus par des femmes, et dans certains secteurs sanitaires du nord du pays le taux de féminisation dépasse bien souvent les 80%. Elles sont de plus en plus nombreuses aux postes élevés de la hiérarchie médicale. En 1996 déjà, notre spécialiste avait relevé que 50% des résidents, 40% des maîtres assistants et 28% des docents étaient des femmes. Maintenir le code de la famille qui dans sa version actuelle fait obligation à toutes ces élites féminines de demander l'autorisation d'un tuteur pour convoler en justes noces avec un homme de leur choix, relève d'un combat d'arrière-garde qui fait perdre un temps précieux à une société qui a résolument mis le cap sur le progrès et la modernité. Les avancées socioprofessionnelles gagnées de haute lutte par nos femmesne sauraient être stoppées par ceux qui veulent tirer la société algérienne vers le bas.