La vingtaine d'inspecteurs internationaux chargés de lancer l'opération de démantèlement des armes chimiques syriennes sont entrés hier en Syrie à partir du Liban. Ces inspecteurs de l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC) sont chargés de faire appliquer une résolution de l'ONU encadrant la destruction de l'arsenal chimique syrien. Les autorités syriennes ont fourni, le 19 septembre, une liste des sites de production et de stockage des armes chimiques devant être inspectés dans les 30 jours, dans le cadre d'un accord russo-américain prévoyant le désarmement chimique du pays d'ici mi-2014. Cet accord a mis fin à la menace d'une action militaire punitive brandie par plusieurs pays, Etats-Unis en tête, après l'attaque au gaz sarin du 21 août près de Damas, que ces pays imputent au régime. Damas dément avoir perpétré l'attaque et en accuse les rebelles. Bras de fer inédit depuis la guerre froide entre les Etats-Unis et la Russie, qui aurait pu aboutir à une déflagration régionale. Plus de 1000 tonnes d'armes chimiques Les inspecteurs de l'ONU qui ont enquêté sur l'attaque du 21 août dernier ont relevé une utilisation de gaz sarin à grande échelle, mais leur mission n'était pas de désigner un responsable. Revenue la semaine dernière enquêter sur d'autres allégations d'utilisation d'armes chimiques, l'équipe a quitté le pays lundi et doit rendre un second rapport fin octobre. La Syrie possède plus de 1000 tonnes d'armes chimiques, dont 300 tonnes de gaz moutarde et sarin, répartis sur environ 45 sites. Leur élimination constituera l'une des opérations de désarmement les plus ambitieuses et les plus dangereuses jamais tentées. De telles opérations ont déjà été entreprises en Irak et en Libye mais jamais en pleine guerre – or la Syrie s'enfonce chaque jour dans un conflit complexe qui a fait, selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), plus de 115 000 morts depuis mars 2011. Devant l'ampleur du drame, 17 pays ont accepté d'ouvrir leurs frontières à des réfugiés syriens désireux de s'y installer. S'exprimant au cours d'une conférence de presse à l'issue d'une réunion du comité exécutif du HCR, le Haut-commissaire aux réfugiés des Nations unies, Antonio Guterres, a ajouté que ces pays pourraient accueillir plus de 10 000 réfugiés en quête d'un nouvel avenir. Parmi ces pays, qui sont prêts à participer au programme de réinstallation des réfugiés syriens de l'ONU figure, pour la première fois, le Mexique, a-t-il indiqué, en précisant que les autres pays étaient ceux qui, traditionnellement, accueillaient les réfugiés en quête de réinstallation. Les 17 pays sont l'Australie, l'Autriche, le Canada, la Finlande, l'Allemagne, la Hongrie, le Luxembourg, les Pays-Bas, la Nouvelle-Zélande, la Norvège, l'Espagne, la Suède, la Suisse, le Danemark, la France, les Etats-Unis et le Mexique.Après avoir trouvé un accord sur l'arsenal chimique syrien, Russes et Américains s'emploient justement maintenant à convaincre l'opposition et le pouvoir de s'asseoir à une table de négociations pour trouver une issue politique à la crise. A ce propos, la Russie a indiqué hier que le régime du président syrien Bachar Al Assad pourrait entamer des négociations de paix avec les éléments modérés de l'opposition armée à la conférence internationale de paix prévue à Genève le mois prochain. «Je n'exclus pas que l'opposition armée, si elle ne se prononce pas pour les extrémistes et n'a pas de visions terroristes, puisse être très bien représentée» à cette conférence dite «Genève 2», a déclaré M. Lavrov. «A propos, c'est quelque chose que le président Al Assad a aussi dit», a ajouté M. Lavrov lors d'une conférence de presse à l'issue d'entretiens avec le secrétaire général de l'Organisation de la coopération islamique (OCI), Ekmeleddin Ihsanoglu. Genève 2, une étape encore éloignée L'initiative d'une nouvelle conférence internationale à Genève, rassemblant notamment des représentants du gouvernement syrien et de l'opposition, a été lancée en mai par les chefs des diplomaties russe et américaine, Sergueï Lavrov et John Kerry, en vue de mettre fin au conflit syrien. Mais l'organisation de cette réunion prévue à la mi-novembre a été repoussée à plusieurs reprises en raison de désaccord sur les objectifs et les participants. L'incapacité de l'opposition à parler d'une seule voix constitue aussi un sérieux handicap. Dans ce contexte, M. Lavrov a insisté sur le fait que les Occidentaux et des pays arabes ayant un rôle-clé dans la région devaient faire en sorte que les groupes d'opposition armée se mettent d'accord pour participer à Genève 2, doutant cependant que cela puisse se faire d'ici novembre. «Jusqu'à récemment, nous nous attendions à ce que nos partenaires occidentaux, qui se sont engagés à ce que l'opposition participe à la conférence, puissent y arriver assez rapidement», a observé M. Lavrov. «Mais ils ne sont pas parvenus à le faire rapidement. Je ne sais pas s'ils y arriveront d'ici la mi-novembre», a-t-il souligné. Genève 2 doit reprendre les grandes lignes d'un accord international sur une transition politique en Syrie, signé le 30 juin 2012 à Genève mais jamais appliqué.