Américains et Russes vont reprendre samedi à Genève leurs pourparlers sur l'arsenal chimique syrien, entrés dans une phase "décisive", sous la pression des Nations unies qui ont accusé vendredi le régime de Damas "de nombreux crimes contre l'humanité". Le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon a jeté vendredi une ombre sur ces négociations ouvertes la veille en Suisse en affirmant que le rapport des experts de l'ONU "va conclure de manière accablante" à l'utilisation d'armes chimiques en Syrie, sans en attribuer directement la responsabilité au régime syrien. Mais il a clairement accusé le président Bachar al-Assad d'avoir "commis de nombreux crimes contre l'humanité" et s'est dit "persuadé que les responsables rendraient des comptes quand tout cela sera fini". Ban Ki-moon a également dit "partager" le scepticisme de la communauté internationale sur la volonté de Damas de démanteler son arsenal chimique sous supervision internationale, comme l'a proposé Moscou. "Il est donc important que les autorités syriennes appliquent ce qu'elles ont dit de manière sincère et exacte" afin de prouver leur bonne foi, a-t-il déclaré dans une interview à la chaîne France 24. Le rapport des experts de l'ONU qui ont enquêté sur place sur les accusations de massacre à l'arme chimique le 21 août près de Damas est attendu lundi, selon Paris. Leur mandat ne prévoit cependant pas qu'ils désignent les responsables de l'utilisation de ces armes. Vendredi, tout au long de la journée, le Secrétaire d'Etat américain John Kerry et son homologue russe Sergueï Lavrov ont multiplié les entretiens, accompagnés ou non de leurs experts en désarmement, pour tenter de trouver un accord sur les modalités d'un démantelement de l'arsenal chimique syrien. "Nous sommes clairement arrivés à un moment décisif", a souligné à Genève un haut-responsable américain. Les deux parties "ont fait des progrès vers un accord sur l'évalutation du stock d'armes chimiques", a-t-il précisé. Les Etats-Unis estiment à plus de 1.000 tonnes cet arsenal composé entre autres de gaz sarin ou moutarde, soit un chiffre plus élevé que les estimations russes, selon ce responsable. Américains et Russes espèrent aussi que ces pourparlers débouchent sur un accord plus ambitieux visant à mettre un terme à une guerre civile qui déjà fait quelque 110.000 morts depuis deux ans et demi. Quelque 500.000 personnes seraient "prises au piège" des combats "dans la banlieue rurale de Damas", manquant de vivres, d'eau et de médicaments, a rappelé vendredi la responsable des opérations humanitaires de l'ONU, Valérie Amos. John Kerry s'est déclaré déterminé, avec Sergueï Lavrov, "à travailler ensemble, à commencer par l'initiative sur les armes chimiques, avec l'espoir que (ces) efforts seront payants et apporteront paix et stabilité dans cette région tourmentée du monde". Dans l'après-midi il a précisé avoir convenu avec Sergueï Lavrov d'une nouvelle réunion "à New York autour du 28 septembre", en marge de l'Assemblée générale annuelle de l'ONU, pour fixer une date pour une conférence de paix sur la Syrie. A l'issue d'une rencontre tripartite avec l'émissaire des Nations unies et de la Ligue arabe pour la Syrie Lakhdar Brahimi, Sergueï Lavrov a réaffirmé l'engagement de la Russie en faveur d'une conférence de paix avec la participation de "tous les groupes de la société syrienne".