Le 22 octobre 1942. Une ferme de Messelmoune (Tipasa, à 110 km à l'ouest d'Alger) accueille dans le secret absolu une réunion américano-anglaise, en présence des résistants français, présidée par l'adjoint du général Eisenhower. Aujourd'hui, ce lieu chargé d'histoire est transformé en dépotoir et il n'existe aucune signalétique indiquant que des hommes y ont discuté de l'avenir du monde et de la libération de l'Europe et de l'Afrique, à l'exception d'une plaque, à l'entrée : «Ici commence la route de la libération de la France, de l'Europe et du monde du joug nazi.» Cette rencontre est décidée trois jours plus tôt, lors d'une réunion avec le lieutenant anglais, Norman Limbury Auchinleck Jewell (29 ans), commandant du petit sous-marin Seraph, convoqué par le major général américain Mark Wayne Clark via le capitaine anglais Fawkes à la résidence du gouverneur à Gibraltar. «Le projet est parfaitement réalisable», avait déclaré le capitaine anglais Fawkes au général américain Clark adjoint du général Dwight Eisenhower, commandant en chef des forces terrestres, navales et aériennes de la coalition contre les armées nazies. Robert Murphy, le chargé des intérêts américains auprès de l'Algérie colonisée, est aussitôt prévenu de cet arrangement. Les responsables militaires américains dirigés par le général Clark sont conduits du sous-marin Seraph vers la plage de Messelmoune - 5 Américains et 3 commandos anglais à répartir sur les 4 embarcations démontables - avant d'y retourner après la réunion. Même à bord, l'objet de la réunion est gardé secret. «Nous reconnaîtrons la maison, car à sa gauche, quand nous la regardons de la mer, on apercevra une grande colline en pain de sucre (colline de Hadjret-Ennous, ndlr) et un petit oued qui se jette dans la mer, explique le général Clark. Les habitants de cette maison dirigeront vers nous une puissante lumière blanche. Certains d'entre eux seront sur la plage pour nous accueillir.» Le général américain Clark décide de quitter le sous-marin en tenue militaire. «Nous irons à terre en tant qu'officiers américains pas autrement, affirme-t-il. Cela aidera les gens que nous devons rencontrer à se souvenir de ce que nous sommes et de ce que nous représentons. Il ne faut pas qu'ils oublient un seul instant que nous sommes Américains et que derrière nous, il y a des milliers d'autres Américains.» En plus des Anglais, des Américains, des Français, quelques ouvriers algériens qui travaillent à la ferme sont présents lors du débarquement, vers 2h du matin. Certains préparent les repas pour les officiers. Le propriétaire de la ferme s'appelle Jacques Tessier. «Ils étaient aimables et souriants», selon les témoignages des commandos anglais. Deux heures plus tard, les Américains escortés par les commandos anglais regagnent le Seraph malgré une mer houleuse. Le débarquement des troupes alliées en Afrique du Nord commencera dans la nuit du samedi 7 au dimanche 8 novembre 1942 à Alger. L'opération «Torch» marquera le 1er succès des alliés. L'Afrique du Nord passe aux mains des forces militaires américano-anglaises avec le soutien de la résistance française. Malgré des premiers travaux de réaménagement en 2004, le relogement de familles en 2007, le classement du site sur la liste des monuments historiques nationaux et une importante aide financière des pouvoirs publics, rien ne change.