L'opposition syrienne devrait payer pour sa propre division. Et quelle division, puisque les querelles se règlent à coups de mortier et autres atrocités. Et des dizaines de factions préoccupées aussi, constate-t-on, non pas à accélérer la chute du régime qu'elles combattent depuis bientôt trois années, mais à conquérir et occuper les territoires qu'elles peuvent arracher aussi bien aux forces encore fidèles à Bachar Al Assad qu'aux formations également rebelles mais néanmoins rivales. Une bien triste réalité qui donne plus qu'un simple répit au pouvoir syrien et s'éloigne des plans proposés par les organisations internationales, et depuis peu de la conférence dite de Genève 2, dont on connaît au moins la date. Ce sera le 23 novembre prochain, sauf que le tour de table n'est même pas entamé, inachevé serait beaucoup dire. Le problème étant l'opposition qui refuse d'y aller au risque d'implosion – si ce n'est déjà le cas – des dizaines de formations ayant menacé la Coalition nationale syrienne (CNS) d'un retrait de confiance si elle décidait d'y aller. Un véritable problème pour l'émissaire international qui estimait, hier, qu'il n'était pas envisageable de réunir la conférence en question en l'absence d'une opposition syrienne «crédible». Ayant déjà soulevé pareille réserve dès qu'il avait commencé sa mission de médiation, en août 2012, Lakhdar Brahimi estime que cette conférence «ne se tiendra pas sans une opposition crédible, représentant une importante partie du peuple syrien opposée» au régime de Bachar Al Assad. Bien entendu, M. Brahimi sait de quoi il s'agit et à quoi il pense pour l'avoir déjà dit et mis en œuvre il y a une année, en allant à la rencontre d'opposants syriens, certains étant devenus célèbres, refusant la moindre exclusion qui ne fait, se rend-on compte, que s'étendre. M. Brahimi avait envisagé pareille situation dès le mois de septembre dernier, lorsqu'il déclarait que «le problème, c'est que chaque partie prenante à cette guerre civile pense gagner sur le plan militaire», assurant qu'il ne peut pas y avoir de solution militaire. «Personne ne va gagner», déclarait-il alors, sans arriver apparemment à convaincre la rébellion de renoncer à son exigence, le départ préalable du régime et le refus de ce dernier de renoncer au pouvoir. En tout état de cause, l'opposition doit donner une réponse définitive la semaine prochaine à Istanbul. Mais avant cela, les ministres de 11 pays occidentaux et arabes et l'opposition syrienne dite modérée se retrouveront demain à Londres pour préparer la conférence de Genève et convaincre les plus réticents de la Coalition nationale syrienne d'adhérer au processus. Selon William Hague, ministre britannique des Affaires étrangères, il y sera question de «discuter de la préparation de la conférence de Genève 2, du soutien à la Coalition nationale syrienne et de nos efforts pour parvenir à un règlement politique de ce conflit tragique». «Nous tentons de faire avancer le processus politique», a indiqué de son côté le secrétaire d'Etat américain, John Kerry, qui, avant Londres, rencontrera aujourd'hui à Paris des ministres arabes. Il y a donc beaucoup à faire, car pour le chef de la CNS, Ahmed Jarba, Genève 2 doit avoir un «but clair» et «un cadre clair dans le temps». C'est pourtant là qu'apparaissent les divisions au sein de la rébellion. Le CNS, le groupe le plus important de la Coalition, a annoncé qu'il n'irait pas à Genève et a menacé de faire scission si la CNS y assiste. Un coup vraiment dur qui peut même être fatal. Pour la CNS, mais aussi pour le processus actuel. Donc la guerre sans fin ?