Karima Sennouci, cette jeune suppliciée, victime de violence conjugale, a rendu l'âme après trois mois d'horribles souffrances. Seule, loin des regards et dans la discrétion la plus totale, elle a été enterrée lundi dernier, dans sa ville natale à Frenda. Elle attendait avec impatience la visite de ses trois enfants, à l'occasion de la Fête des mères, mais la providence en a décidé autrement. Elle s'est éteinte sans pouvoir leur dire au revoir et sans même dire adieu aux quelques personnes qui l'ont aidée à surmonter sa douleur. Son histoire ne relève pas de la fiction, mais d'une réalité amère et tragique qui mérite la mobilisation la plus large de la société civile pour lutter contre les violences conjugales. Karima, âgée de 31 ans selon son état civil, a passé huit longues années auprès d'un mari, son cousin, violent, qui la battait chaque jour que Dieu fait, sans que ses cris de douleur ne soient entendus par ses proches. Pour ces derniers, un mari a le droit de battre sa femme et celle-ci ne doit aucunement se plaindre. Karima subissait, jusqu'au jour où son corps a fini par lâcher. C'était le 1er mars dernier. Battue à mort à l'aide d'un couteau et d'une épée, Karima a perdu connaissance. Ce qui n'a pas empêché son bourreau de mettre le feu à l'aide d'un journal à ses habits. Gravement blessée, ne respirant presque plus, ses proches ont pris la décision de la transférer à l'hôpital de Frenda, puis vers les urgences du CHU d'Oran. Son état était critique : brûlures au troisième degré de la partie inférieure de son corps et les organes vitaux très affectés. Karima a dû être amputée de sa jambe droite carbonisée et a subi également une celioscopie. Son état et son histoire tragique ont suscité un dévouement et une solidarité de l'équipe médicale du CHU d'Oran, mais aussi la compassion de nombreux anonymes et de militantes des associations féminines RAFD et de FAM. Ces dernières, grâce à leurs relais, ont entrepris des démarches pour son transfert à Alger puis en France. Malheureusement, les tortures qu'elle avait subies n'ont pas permis à la pauvre Karima de se relever. Le 2 mai, le jour même où toutes les démarches pour son transfert avaient abouti, elle a fait un choc septique, qui a nécessité son transfert pour la seconde fois, au service des urgences, pour recevoir des soins intensifs jusqu'au 17 mai dernier. Elle fut transférée vers le service des brûlés, mais dans un état désespéré. Pendant dix jours, elle se battait contre la mort et voulait à tout prix voir ses trois enfants, en cette journée de la Fête des mères. Malheureusement, la chance n'était pas de son côté. Après le coucher du soleil de cette journée du 27 mai, Karima a rendu l'âme, sans dire adieu à ses enfants ou encore voir son bourreau répondre de ses horribles actes. Après trois mois de grandes souffrances et de douleur, loin des projecteurs, les supplices de cette femme martyre ont honteusement été occultés, exception faite de quelques entrefilets parus sur la presse locale. Son décès à la suite de ses graves blessures n'a pas pour autant incité les services de sécurité à ouvrir une information judiciaire. est morte et son bourreau n'aura pas à s'expliquer devant la justice.