Cette frange de la société réclame du travail, selon ses capacités, pour préserver sa dignité et échapper au statut d'éternel assisté. Le 3 décembre n'a absolument aucun sens pour la plupart des personnes en état de handicap que nous avons approchées. C'est une date qui les déprime car, disent-elles, elle sert surtout de faire-valoir aux instances officielles concernées. La réalité crue est que les handicapés, tout type confondu, subissent une marginalisation systématique. Comment font-ils pour subsister avec la ridicule pension de 3000 ou 4000 DA, selon le degré du handicap, octroyée par l'Etat ? Il ne fait vraiment pas bon vivre dans ce pays quand on souffre d'un handicap. Sans compter que même les déplacements les plus nécessaires sont un cauchemar pour les handicapés moteurs, quand on constate encore que rares sont les administrations et autres organismes à avoir pensé à aménager des passages et autres accès spécifiques à cette catégorie de personnes. Citons, d'autre part, l'exemple du jeune Hamza El Hadef El Okki, handicapé moteur à 80%, âgé de 29 ans, dont le handicap n'empêche pas de ramener des distinctions à son club, l'association Massinissa d'El Khroub. Excellent nageur, catégorie S9 S10, «nage dos», il a récolté médailles d'or et de bronze lors du dernier championnat national handisport. Mais parallèlement à cette activité sportive, il n'arrive pas à trouver du travail pour subvenir à ses besoins. «Je ne demande pas la charité, je ne suis pas invalide, je peux travailler à condition que ce soit un travail à la hauteur de mes capacités», nous a-t-il déclaré. Beaucoup d'autres sont dans son cas. Parlons encore de Hanane et de Fayçal, tous les deux handicapés moteurs en fauteuil roulant, excellents nageurs, et qui, paradoxalement, n'arrivent pas à vivre décemment. Ou encore Noureddine Ziari, non-voyant, 33 ans, qui, même s'il est arrivé à décrocher un emploi de standardiste à la mairie de Aïn Smara dans le cadre du filet social, par contrat à durée déterminée (CDD) pour 8000 DA/mois, ne peut espérer fonder un jour un foyer dans ces conditions. Il y a encore notre champion d'Algérie de natation, Abderrezak Amrouche, 33 ans, malvoyant, qui travaille sous CDD au secteur urbain d'El Gammas comme homme à tout faire depuis 5 ans. Toutes ses démarches effectuées jusque-là pour être titularisé ont été vaines. Peut-il aspirer à une vie digne avec 8000 DA/mois, étant marié, qui plus est ? La plupart de ces jeunes handicapés sont en attente d'une titularisation ou d'un emploi approprié et stable, après avoir déposé un dossier à l'APC, laquelle, a-ton-appris, dispose de 400 postes d'OP au profit de cette frange de la société. N'oublions pas, par ailleurs, que la journée internationale, le 3 décembre, pour les personnes handicapées, proclamée en 1992 par l'ONU, est censée rappeler à tout un chacun les principes suivants : «Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droit ; le respect de cette dignité due à chaque personne, -valide ou non- implique la reconnaissance de droits fondamentaux comme l'éducation ou l'accès au travail». La dignité humaine ne peut, en effet, exister que dans le droit au travail.