Le rapport annuel de la Cour des comptes évoque pas moins de 8000 milliards de dinars, soit l'équivalent de plus de 100 milliards de dollars de recettes fiscales non recouvrées. Inefficience dans l'exécution du budget de l'Etat, manquements dans la réalisation des programmes d'équipements publics, gestion approximative des comptes d'affectation spéciale, et enfin grosses carences en matière de recouvrements fiscaux. Comme chaque année, la présentation de la loi de règlement budgétaire pour l'exercice n-3 (l'exercice 2011, pour cette fois), à l'Assemblée populaire nationale, est l'occasion de mettre une nouvelle fois en lumière les insuffisances d'une économie rentière, notamment les failles en termes de gestion des finances publiques. Cependant, cette année aura été clairement marquée par une observation de la Cour des comptes qui tance tout particulièrement l'administration fiscale. Et pour cause, le rapport annuel de l'organisme de contrôle a posteriori des finances de l'Etat évoque pas moins de 8000 milliards de dinars, soit l'équivalent de plus de 100 milliards de dollars de recettes fiscales non recouvrées. Un comble, lorsque l'on sait qu'en situation de déficit budgétaire — laquelle perdure depuis au moins quatre années — de telles sommes pourraient couvrir à elles seules les dépenses de l'Etat durant plus d'une année. Il n'en fallait pas plus pour que le ministre des Finances, Karim Djoudi, brandisse lors de son passage à l'APN, jeudi, l'argument de la DGI selon lequel il y a une telle accumulation de recettes fiscales non recouvrées. Dans un contexte où l'extradition de Abdelmoumen Khalifa et le retour de l'ex-patron d'Union Bank en Algérie ravivent les polémiques autour des scandales bancaires des années 2000, l'évocation de l'affaire de la BCIA ne laissera personne insensible. Le ministre a ainsi rappelé que la majorité des impôts non recouvrés est constituée de 5000 milliards de dinars d'amendes pénales irrécouvrables dans le cadre de l'affaire BCIA, «en raison de l'indisponibilité des actifs de cette banque dissoute», selon les propos répercutés jeudi par l'agence APS. D'où la nécessité, selon le premier argentier du pays, de «faire la distinction entre les impôts, taxes, amendes pénales et dettes fiscales pour connaître le montant d'impôts non recouvrés pour une année déterminée». Un discours qui se veut l'écho des recommandations de la commission des finances et du budget auprès de l'Assemblée «pour mettre fin au cumul des recettes fiscales non recouvrées à travers la création de fiscalités sectorielles qui prennent en compte la différence entre les impôts et taxes à recouvrer et les amendes pénales». Pourtant l'argumentaire en question fait l'impasse sur une question essentielle, celle de l'efficience des recouvrements fiscaux. Car si les amendes pénales de BCIA justifient en partie le cumul des manques à recouvrer, nul mot n'est soufflé à propos des 3000 milliards restants et qui représentent pas moins de 30 milliards d'euros que l'administration fiscale peine à récupérer auprès des contribuables, sans oublier les sommes astronomiques qui circulent dans le circuit informel. Une manière sans doute de noyer le poisson ! En tout état de cause, l'administration fiscale n'est pas la seule à être blâmée en ce qui concerne l'inefficience de la gestion du budget de l'Etat. La commission des finances et du budget a une nouvelle fois mis en avant les fonds qui dorment dans des comptes d'affectation spéciale et a proposé la fermeture des CAS, si leur sdotations ne sont pas consommées au bout de 4 années. Autre question jugée essentielle pour le bon suivi des lois de finances, celle relative au calendrier de présentation de la loi de règlement budgétaire, que les députés ont souhaité à l'ouverture de la session d'automne de l'APN, soit avant la présentation de la loi de finances, pour revenir définitivement à la norme en la matière.