La Confédération internationale des syndicats libres (CISL), dans son rapport annuel sur les violations des droits syndicaux publié ce week-end à Bruxelles, fait état de restrictions dans les textes et dans la pratique des libertés syndicales en Algérie. Ainsi, la CISL, implantée à Bruxelles et forte de 155 millions de travailleurs à travers 154 pays, reconnaît que le respect des libertés syndicales, en Algérie, est « souvent » mis à mal dans le secteur public comme dans le secteur privé, où les travailleurs sont victimes de « nombreux abus ». La CISL, qui rappelle la ratification par l'Algérie de la convention de l'Organisation internationale du travail (OIT), relève, en revanche, que les textes législatifs régissant la liberté syndicale sont « restrictifs ». A titre d'exemple, la CISL déplore le fait que les syndicats, pour qu'ils soient opérationnels du point de vue juridique, « doivent » obtenir une autorisation préalable du gouvernement (ministère du Travail et de la Sécurité sociale). La loi, ajoute la CISL, « interdit » aux syndicats de s'associer à un parti politique ou de recevoir des fonds d'origine étrangère. Autre grief juridique, un syndicat « doit » affilier au moins 20% des travailleurs pour être « reconnu ». Le rapport 2006 souligne, également, que les tribunaux ont le « pouvoir » de dissoudre un syndicat qui entreprend des activités « illégales ». En outre, et en vertu de l'état d'urgence décrété en 1992, toute action entreprise dans l'intention de faire obstruction aux activités d'une société fournissant des services publics ou d'empêcher la circulation ou la liberté de mouvement, peut être passible de peine allant jusqu'à 20 ans de prison. Dans la pratique, la CISL indique que les autorités font « parfois » obstruction à l'enregistrement de nouveaux syndicats en refusant « simplement » d'accuser réception de leur demande d'enregistrement. Le cas du Cnapest et du Cla, qui attendent leur récépissé depuis 2003, corrobore cette critique. Sur le même plan, la CISL, en se référant au rapport établi par le Syndicat national autonome des personnels de l'administration publique (Snapap), constate que les membres de cette organisation sont « régulièrement » l'objet de harcèlement et de persécution. « Le gouvernement a rejeté deux demandes de constitution d'une confédération nationale », relève-t-on dans le rapport de la CISL, qui mentionne que des sections syndicales n'ont pu être créées, notamment dans les hôpitaux. Pour les syndicats « indépendants », la CISL souligne que la « systématisation » des contrats temporaires dans le secteur public « complique » l'adhésion syndicale. Le rapport indique, également, que le secteur privé et le secteur informel connaissent une « faible » implantation syndicale. Pour la CISL, ces deux secteurs, qui connaissent un développement considérable, sont « synonyme » d'inapplication de la réglementation du travail, d'absence de protection sociale et d'absence de libertés syndicales. Pour les violations rapportées, la CISL cite le recours « abusif » à la justice pour qualifier la grève d'« illégale ». Le référé est l'arme de l'administration. Plusieurs grèves menées par les syndicats autonomes dans les secteurs de l'éducation, de l'enseignement supérieur, de la santé et des vétérinaires et même du port ont été gelées par le recours à la justice, en dépit du dépôt des préavis de grève. Seul le Cnes a eu, en partie, gain de cause.