Le programme de Logement promotionnel public (LPP) a-t-il été lancé dans la précipitation, sans «ancrage juridique» ? C'est ce que redoutent des souscripteurs, qui se sont regroupés en Collectif des souscripteurs LPP (CSLPP) qui compte, pour l'heure, quelque 300 membres. Ils jugent que la précipitation et les considérations politiques et populistes ont primé sur la réglementation et la conformité. Leur hantise ? «Etre les prochains AADL 2001/2002.» Le problème que soulèvent ces acquéreurs a trait à «l'assise juridique» de ce projet. «Normalement, selon la loi 11-04 concernant la promotion immobilière, lorsqu'un souscripteur reçoit l'ordre de versement et qu'il effectue le premier versement, le promoteur se doit de lui remettre un contrat de réservation qui établit l'affectation du logement, sa typologie, son type, sa superficie, son descriptif et ses caractéristiques, ainsi qu'un cahier des charges», explique Fayçal Serai, membre du CSLPP. Et les souscripteurs doutent que l'ENPI puisse remplir cette exigence. «Ce contrat de réservation ne peut être établi que lorsque le promoteur est détenteur d'un permis de construire. Et pour se faire accorder un permis de construire, un acte de propriété est obligatoire. Ce qui implique que les assiettes foncières prévues à cet effet soient d'ores et déjà dégagées et propriété de l'ENPI. Ce qui n'est pas le cas», ajoute Karim Chenit, porte-parole du CSLPP. «Lorsque nous allons effectuer le premier paiement, qu'allons-nous recevoir ? Un reçu de versement qui n'a aucune valeur auprès du Fonds de garantie et de caution mutuelle de la promotion immobilière», poursuit-il. Boycott du versement de la première tranche Et l'un des membres de ce groupe va même plus loin : «L'ENPI est une entreprise publique économique (EPE), contrôlée et auditée en conformité avec les textes et la législation en vigueur par l'inspection générale des finances (IGF). Comment les responsables de l'ENPI vont-ils justifier l'encaissement de l'argent des paiements s'ils ne détiennent pas de contrats de réservation ?» De même, le CSLPP relève d'autres «points noirs» quant à cette formule, notamment en ce qui concerne les prix ou encore le taux d'intérêt du crédit. «Dans ces conditions, nous ne voyons pas le caractère public de cette formule», déplore-t-il. A quelques jours du début de l'opération de retrait des ordres de versement, à partir du 15 février, les zones d'ombre et les flous juridiques qui entourent ce programme ne sont pas pour les rassurer. D'ailleurs, certains d'entre eux appellent tout bonnement au boycott du versement de la première tranche. Une demande d'audience a été introduite par le CSLPP auprès du directeur de l'ENPI afin d'exposer les craintes des souscripteurs. «Ce que nous attendons de l'ENPI, ce sont de plus amples informations afin de lever les zones d'ombre qui entourent ce programme. Nous avons besoin d'être rassurés avant de débourser des sommes plus que conséquentes, ne serait-ce qu'avec des ‘solutions palliatives'», demandent-ils. La direction de l'ENPI était injoignable et n'a pas pu donner de plus amples précisions quant aux doutes émis par ces souscripteurs.