Trois patriotes ont été tués à Draâ El Mizan... un officier de la BMPJ grièvement blessé près de Boumerdès. Chronique du terrorisme des dernières quarante-huit heures. Quelques lignes dans quelques journaux indépendants qui s'intéressent encore à ces Algériens qui continuent quasi quotidiennement de tomber dans un attentat à la bombe, un faux barrage ou au détour d'un chemin communal. Presque toujours anonymes, ils sont victimes d'un terrorisme que l'Etat a décidé de faire oublier en taisant ses méfaits ou en les banalisant à l'extrême. Silence sur les cimetières qui n'arrêtent pas de se remplir et sur les grandes douleurs des proches des victimes. Y compris lorsqu'elles sont soldats, policiers, douaniers ou gardes communaux, pourtant morts en martyrs, en service commandé. Sous d'autres cieux, dans les pays développés notamment, lorsqu'un simple agent de l'Etat est victime du terrorisme, les plus hautes instances officielles se dictent de l'honorer et toute la société mobilisée pour exprimer son émotion et son rejet de la barbarie : car celle-ci ne saurait se banaliser ni devenir un enjeu politique quelconque. Ces derniers jours, nombre d'Espagnols et de représentants élus ont dénié au gouvernement le droit de négocier avec l'ETA, jugé comme une insulte aux victimes de l'organisation séparatiste basque. On en est loin en Algérie, pays qui vit une situation ubuesque : lancée en grande pompe, la réconciliation nationale n'a finalement servi qu'à couvrir juridiquement la question des quelques terroristes en position d'attente dans les maquis depuis fort longtemps et ne présentant aucun danger pour la sécurité. En revanche, ceux qualifiés d'irréductibles ont fui les sirènes du pardon et de la main tendue. Et sur tous les tableaux, ils ont gagné : ils poursuivent leur aventure djihadiste, l'Etat est politiquement à genoux devant eux et leurs victimes sont effacées de la mémoire collective. Mieux, on honore leurs émirs, on déploie le tapis rouge devant leurs commanditaires et on leur fabrique un avenir politique. Avec une certaine bénédiction des capitales occidentales que n'inquiète en réalité que le terrorisme susceptible de sortir des frontières algériennes. Durant la décennie 90, ces capitales n'avaient eu pour seules réponses que l'embargo total sur l'Algérie et la programmation de l'intégrisme assassin comme possible alternative politique. L'Occident depuis s'est certes adapté aux conséquences de septembre 2001, mais n'a pas changé fondamentalement son regard sur la nature de la crise qui affecte le pays.