Il n'y avait pas foule samedi dernier à l'hommage consacré à Tahar Djaout, assassiné par les terroristes le 26 mai 1993. Même la presse indépendante n'a rendu compte qu'à travers quelques titres de la manifestation qui avait pour cadre la Bibliothèque nationale d'Alger et qui devait rappeler le parcours du journaliste, écrivain et fondateur de l'hebdomadaire Ruptures. L'absence des représentants de la société civile et le faible écho médiatique de cet hommage ne peuvent qu'interpeller les consciences sur les effets, hélas combien dévastateurs, de cette culture de l'oubli initiée par la politique de la réconciliation nationale, chère au président Bouteflika. Une politique appuyée par Abdelaziz Belkhadem et, malheureusement, sanctionnée par la réponse apportée par les hordes du GSPC, avec l'embuscade tendue aux troupes de l'ANP, mercredi dernier, dans la région de Bouira. Une embuscade au cours de laquelle sept militaires ont été assassinés. La veille, cinq paysans de la région de Blida ont péri sous la lame assassine des terroristes. Alors que dans la région de Tizi Ouzou, trois patriotes ont sauté sur une mine artisanale posée par des éléments du GSPC. Mais aucun des attentats n'a semblé émouvoir la présidence de la République, encore moins le gouvernement, pas la moindre pensée aux victimes, pas le moindre recueillement officiel. Pas même à la mémoire des militaires morts en service commandé. Cela aurait été la moindre des reconnaissances de l'Etat et de la nation envers les éléments de l'ANP. La télévision algérienne et l'agence officielle d'information APS ont tout simplement ignoré ces douloureux tragiques événements. Mais puisque l'heure est au bilan, à l'instar de celui très complaisant dressé par les walis, devant le président de la République au Palais des nations, rappelons que depuis le début du mois de juin, une trentaine de personnes ont été victimes du terrorisme. Non seulement cela fait 30 victimes de trop, mais au risque de nous répéter, un bilan aussi macabre n'est, en fait, qu'un échec annoncé de la politique de réconciliation nationale et de paix. Et cela, à moins de huit semaines du délai accordé aux terroristes pour être « blanchis » de leurs crimes par la grâce de la politique initiée par Abdelaziz Bouteflika. La culture de l'oubli faisant le reste.