Malgré l'éradication de l'habitat précaire, le lieu demeure un bourg où les constructions défient toutes les règles de l'urbanisme et de l'architecture. A Aïn Beïda, il existe une cité qui n'a de cité que le nom. Située au nord-est de la ville, cette tentaculaire agglomération appelée pompeusement Hay Essalam est née dans le désordre. Au départ, et cela remonte aux années 1970, des citoyens, sans moyens et ne disposant pas d'un toit, y ont érigé des maisons de fortune, c'est à dire des baraques au moyen de matériaux très rudimentaires : parpaing, zinc pour la toiture et même des carcasses de camions. Devant la prolifération de ces taudis, la municipalité d'alors a exhorté les habitants de ce grand bidonville à y apporter des modifications. Des maisonnettes en dur se sont alors substituées aux baraques. C'est déjà ça de bien ! II a fallu que les édiles de l'APC y mettent du leur en bitumant les artères principales, plutôt les rues tortueuses et escarpées. Les habitants ont même eu droit au bienfait de l'électricité et du gaz naturel. Durant les années 1980 et 1990, la ville de Aïn Beïda profite d'un programme d'éradication de l'habitat précaire. Plus de 800 maisonnettes en dur seront construites sur le flanc de la montagne Bouakouz. Des édifices publics ont accompagné cette opération d'envergure. Le plus urgent était de permettre aux enfants de Hay Essalam de bénéficier d'une scolarité. Trois écoles et deux collèges sont venus à leur secours. Quoique l'habitat précaire a été éradiqué dans une large proportion, il n'en reste pas moins que ce conglomérat de constructions, défiant toutes les règles urbanistiques, ressemble à un gros bourg ; les rues sont dépourvues de trottoirs carrelés, d'espaces verts et de places publiques. Chose qui a fait dire à un urbaniste: «Il n'y a pas que cette cité qui souffre du manque de commodités urbanistiques, mais toutes les extensions de la ville en pâtissent.» Avis d'ailleurs que nombre de citadins partagent. En effet, en dehors de l'ancien centre-ville qui remonte à la période coloniale, très peu de quartiers érigés après le recouvrement de l'indépendance présentent un aspect accueillant. Pour en revenir à Hay Essalam, convenons que cette cité qui abrite au moins 5000 habitants, ne dispose pas encore d'un centre commercial, du moins d'un marché de proximité, ni d'espaces verts, ni de lieux de distraction et de rencontres pour les jeunes désoeuvrés. Même la polyclinique, implantée dans le lit d'un oued, tarde à ouvrir ses portes. Pour toute urgence, il faut requérir les services d'un taxi clandestin ou de la Protection civile. En somme, Hay Essalam est un no man's land qui attend de grandes et coûteuses opérations d'amélioration urbaine pour son salut.