Le département des lettres et langue française de l'université de Constantine 1 a organisé du 27 au 29 du mois dernier un colloque international sous le thème «Algérie, 50 ans de pratiques plurilinguistiques». Cinquante ans après l'indépendance, les Algériens ont développé de nouvelles pratiques linguistiques, s'adaptant à la nouvelle donne socioéconomique du pays, adéquates essentiellement à une Algérie ouverte au monde. Ce développement sociolinguistique «naturel» a instauré un nouveau modèle «rival» au monolinguisme, «adapté aux besoins et aspirations permettant aux citoyens de vivre leur passé et d'inventer leur avenir». Les spécialistes disent qu'il est de caractère hétérogène; on parle de plurilinguisme. A ce sujet, nous saurons qu'en cinquante ans d'indépendance la recherche en science du langage a accumulé un nombre conséquent de données sur les pratiques linguistiques des Algériens. C'est l'affirmation de la sociolinguiste, le Pr Dalila Morsly, à laquelle on a rendu hommage en reconnaissance de ses efforts intellectuels (livres, thèses et articles) consacrés à la question. L'initiative revient au département des lettres et langue française de l'université de Constantine 1, qui a organisé du 27 au 29 du mois dernier le colloque international intitulé «Algérie, 50 ans de pratiques plurilinguistiques». Le plurilinguisme est donc le thème choisi pour cette rencontre internationale qui a vu la participation d'une pléiade de chercheurs (plus 30 participants) en langues, en sociolinguisme et en communication, venus de France, de Tunisie et des Algériens. Ainsi, durant trois jours, ces scientifiques ont mis en exergue les pratiques plurilinguistiques algériennes. Ils ont essayé, dans le cadre d'ateliers scientifiques, d'apporter quelques réponses aux problématiques rencontrées. Citons-en quelques-unes au passage : «Quels savoirs pouvons-nous fixer aujourd'hui sur l'état des pratiques dans les différentes langues et variétés (arabes, tamazight, français) - «Quels dispositifs théoriques et méthodologiques sont mis en œuvre dans les recherches pour décrire et analyser la distribution des langues/ variétés ainsi que le phénomène d'alternance ?» Des communications remarquables ont été données par la même occasion, notamment sur les thèmes «Pratiques plurilingues en Algérie : questionnements théoriques et méthodologiques», «Les pratiques linguistiques», «Quelles représentations chez l'élève algérien» et «40 ans de recherches sur le code-switching arabe-français», «Au Maghreb où en est-on aujourd'hui?». Ce dernier thème a été expliqué dans la matinée de la 2e journée de ce colloque par le spécialiste tunisien Foued Laroussi. Selon lui, on parle du code-switching si le locuteur utilise un segment de phrase ou un énoncé appartenant à la langue «a» dans la langue «b» de manière spontanée et automatique. L'intervenant a fait savoir que le code-switching est de plus en plus fréquent entre Magrébins. L'analyse des conversations réalisée par ce chercheur a démontré que cette démarche courante entre les individus ne relève pas d'un handicap linguistique. «Il ne s'agit pas d'une incompétence linguistique, car cela pourrait s'avérer même le contraire : il est plutôt question de la nature de la situation linguistique dans laquelle se trouve le locuteur», a-t-il souligné. Notons que ce colloque, abrité par le campus (500 places) Tidjani Haddam, a été décidé dans le cadre des célébrations du cinquantenaire de l'Algérie indépendante, nous apprend Mme Yasmina Cherrad, professeur audit département et directrice du Laboratoire de recherche en sciences du langage, analyses de discours et didactiques (SLADD) de Constantine, organisateur de cette manifestation scientifique.