Les missions de l'administration fiscale se résument en deux points, selon le directeur général des impôts, Abderrahmane Raouya : la mobilisation des recettes pour le budget de l'Etat et la lutte contre la fraude. Si les enjeux de la mobilisation des recettes semblent pressants dans un pays qui dépend de plus en plus de ses ressources en hydrocarbures, le volet relatif à la lutte contre la fraude et l'évasion fiscale ainsi que la traque des activités dissimulées et l'informel semble beaucoup moins évident. On pourrait dire, à ce sujet, que c'est le serpent qui se mord la queue. Car même si le DGI fait montre des meilleures intentions en la matière, l'informel est plus que jamais présent dans notre quotidien. M. Raouya s'est certes enorgueilli, hier en marge du colloque international sur le contrôle fiscal et les garanties du contribuable organisé par l'Institut d'économie douanière et fiscale, du fait que son administration prenne en charge certains aspects liés à la lutte contre l'informel et l'évasion fiscale. Des missions attribuées au service des investigations fiscales créé auprès du ministère des Finances et qui est pour l'heure en phase de régler les questions liées à l'organisation. Cependant, lorsqu'il s'agit d'évoquer en détail les investigations menées par les services du fisc à ce propos, le DGI redevient vite évasif. Il a ainsi estimé que les marchandises circulant sur le marché informel peuvent provenir de deux sources : soit issues d'activités dissimulées au sein d'ateliers sur le territoire national, ou bien importées frauduleusement. Et à propos de ce dernier point, Abderrahmane Raouya refuse de préciser si les investigations en cours au sein de l'administration fiscale concernent plutôt les petits intermédiaires, ou les barons de l'import-import qu'il qualifie de fraudeurs que le fisc se doit de contôler. Le DGI, qui dit ignorer le nombre exact de ces barons –15, 40 ou même plus – c'est selon la rumeur, affirme que dès que le fisc obtient une information, il peut aussitôt entreprendre des investigations. Et d'ajouter que pour lutter contre l'informel, l'administration fiscale se doit d'obtenir le maximum de données, notamment auprès des services des douanes. Une tâche pas si évidente, lorsque l'on sait les complicités et protections dont peuvent bénéficier les barons, et à quel point il est difficile de suivre le fil d'Ariane, dès le moment où les marchandises quittent les quais des ports pour se perdre dans les méandres des marchés. Le DG des impôts ne cache d'ailleurs pas le fait que cela s'annonce ardu, indiquant que tous les pays du bassin méditerranéen éprouvent des difficultés à cerner cette contrebande. Or, la principale arme dont peut disposer l'administration fiscale, estime-t-il, c'est l'information. Il s'agit, selon lui, de disposer d'une base de données complètes via des relations avec d'autres organismes, notamment bancaires et les grandes entreprises. Viennent ensuite les données relatives aux acquisitions immobilières et autres. Belle échappatoire dans un pays où l'économie souterraine et les transactions cash dominent ! En attendant, l'administration fiscale s'attelle à concentrer ses efforts sur les contrôles des grandes entreprises, l'un des gros segments pourvoyeurs de recettes budgétaires, mais aussi principal foyer de données susceptibles de débusquer la fraude sur les autres types de contribuables, du moins ceux qui déclarent, même en partie, leurs revenus. Quant à ceux qui ne déclarent pas leurs revenus, ils peuvent échapper au fisc, même si le DGI pense que l'on peut toujours les rattraper.