Considéré par le ministère du Travail et de la Sécurité sociale comme un outil d'aide à l'employabilité, le dispositif d'aide à l'insertion professionnelle sous ses différentes formules est aujourd'hui une source de malaise social. De nombreux bénéficiaires de ce système, quand ils ne le rejettent pas, demandent à ce qu'il soit corrigé de sorte à ce qu'il réponde à leurs aspirations. En gros, ils rejettent ce qu'ils considèrent être des emplois «précaires» et plaident pour ce qu'ils appellent de «vrais emplois», aux dires d'Idriss Mekideche, porte-parole du Comité national des contractuels du pré-emploi et du filet social. Ce dernier a organisé plusieurs actions de protestation à travers le pays avec pour revendications l'intégration des contractuels, la comptabilisation des années d'expérience professionnelle, mettre fin au pré-emploi et la mise en place d'une indemnité chômage. Car, selon lui, «le travail précaire est plus dangereux que le chômage». Le sociologue Noureddine Hakiki explique à ce propos que «le travail précaire produit le désenchantement social». L'Etat «patron met en place des systèmes qui finissent par créer la rébellion», le meilleur exemple est celui des contractuels de l'éducation. L'autre souci concerne «le processus de dévalorisation du travail», indique-t-il. Avec des salaires dérisoires et droits sociaux limités, les jeunes ont tendance à ne pas considérer ces emplois comme étant de vrais postes de travail. Au final, «ils risquent de perdre la notion même du travail comme richesse». Pour les économistes, ce sont d'abord les entreprises qui créent de l'emploi ; l'administration, même si elle contribue aussi, a des limites, car «le budget de l'Etat ne peut se nourrir de lui-même et le pétrole est une ressource non renouvelable.» Un provisoire qui dure Mais faut-il rejeter tout le système pour autant ? La réponse serait non. Car, pour cette économiste, le dispositif offre aux jeunes «un premier emploi, une première expérience et donc une initiation à la vie active, même mal rémunéré.» Le problème résiderait plutôt dans la durée de l'emploi, soit «un provisoire qui dure». Si des efforts doivent être faits pour améliorer ce dispositif, c'est donc à ce niveau à travers «des mesures techniques inscrites dans une politique de l'emploi» Le fait est que quand les individus intègrent les secteurs de l'Etat, c'est parce qu'ils «pensent qu'un jour ou l'autre ils seront titularisés», explique M. Hakiki. Pourtant, selon les chiffres du ministère du Travail, c'est surtout dans les secteurs économiques que les placements sont effectués. L'administration publique en capterait à peine un peu plus de 25%. En revanche, ce sont bien les administrations et les institutions publiques qui offrent le plus de chances de permanisation. Les contrats y sont de 3 années renouvelables, et par souci de maintenir la paix sociale, l'Etat serait moins enclin à libérer les contractuels. D'ailleurs, selon M. Hakiki, «l'Etat est obligé d'absorber les 900 000 contractuels existants. Il n'a pas d'autre choix que d'aller vers leur intégration.» Alternative Le fait est que dès le départ, «c'est une solution politique provisoire» qui a été retenue par les pouvoirs publics, soutient le sociologue. La solution économique étant limitée du fait de plusieurs facteurs, au premier rang desquels une croissance économique insuffisante. «Il y a un problème aussi bien dans le taux de création d'entreprises que de la faible taille des entreprises et de la faible densité des PME», explique une économiste. Le tissu des PME est constitué à 95% de très petites entreprises (TPE) de moins de 10 employés. Mettre en place un cadre favorisant la création de nouvelles entreprises, appuyer celles qui existent déjà pour grandir, tout en effectuant une évaluation complète, critique et objective du dispositif en question sont cités par l'économiste comme des préalables au règlement de la question de l'emploi en Algérie. Il ne faut pas que des dispositifs tels que le DAIP soit considérés comme «des éléments sociaux isolés et indépendants de la durabilité liée à une politique économique cohérente», estime notre interlocutrice. Il ne faut pas non plus que ce soit un dispositif «fourre-tout, généreux mais trop général». Les pouvoirs publics gagneraient à «cibler les secteurs, les régions, les priorités, etc». Il y va aussi d'une gestion rationnelle du budget de l'Etat. Encore faut-il avoir des politiques économiques et de l'emploi claires.