Le Comité national de lutte contre le tabagisme, fraîchement installé, a tenu sa première réunion hier à Alger. Il doit faire face à un fléau qui tue près de 15 000 personnes chaque année en Algérie et envahit tous les espaces publics malgré une interdiction prévue par la loi. Fumer provoque 3000 à 4000 cancers du poumon et près de 15 000 décès par an. Selon les statistiques officielles, la consommation de tabac a quasiment triplé ces trente dernières années, touchant de plus en plus de jeunes. Un adolescent sur cinq est fumeur chronique. Le tabagisme est le facteur de décès évitable le plus important dans les pays en développement et dans le monde, mais sa prise en charge est loin de satisfaire en Algérie. Les Algériens fument de plus en plus. La prévalence globale qui était, en 1978, à 7,7% a atteint en 1998 25%. Elle est actuellement à 43,8% chez les hommes et 6,5% chez les femmes. Les campagnes de sensibilisation se multiplient d'année en année. Fumer un paquet de cigarettes par jour durant un an équivaut à une consommation de 7,3 kg de tabac. Le calcul donne froid dans le dos, mais rien n'y fait. Cesser d'en consommer relève du parcours du combattant pour les fumeurs. L'addiction est redoutable et les jeunes y succombent de plus en plus. Dans les kiosques, les adolescents achètent des cigarettes sans difficulté. En témoigne le résultat d'une enquête menée en 2010 et qui révèle que 9,2% des fumeurs sont des écoliers âgés de 13 à 15 ans. Une banalisation dangereuse. La fumée de cigarette se propage dans tous les espaces publics ; pourtant, l'interdiction d'y fumer est prévue par la loi. Application de la loi L'article 63 de la loi 85-05 du 16 février 1985, relative à la protection et à la promotion de la santé, prévoit que «l'usage du tabac est interdit dans les lieux publics». Plusieurs décrets et circulaires ont été adoptés ces dernières années, en vain. La cigarette est partout. Dans les administrations, les aéroports, les gares et les universités. «Même dans nos hôpitaux, qui sont loin d'être des hôpitaux sans tabac», expliquait hier le professeur Noureddine Zidouni, pneumologue, lors d'une conférence de presse organisée au ministère de la Santé (Alger). M. Zidouni préside le Comité national de prévention et de sensibilisation sur le tabagisme, qui vient tout juste d'être installé et rassemble une commission interministérielle, en application de la décision n°4 du Premier ministre datant du 14 juillet dernier. Un plan d'action qui donne suite à plusieurs autres, initiés ces dernières années. Composé de cadres de différents ministères – Intérieur, Justice, Jeunesse, Santé, Affaires religieuses, Commerce, Transports, Solidarité, Famille et Condition féminine, Communication – ce Comité lancera ses premières actions en septembre 2014. «C'est la première fois que la question du tabagisme rassemble une commission multiministérielle», précise son président, le Pr Zidouni. Les objectifs sont ambitieux : réduire la prévalence du tabac, augmenter la proportion de la population connaissant les méfaits du tabac et renforcer les capacités des acteurs impliqués dans la lutte antitabac. Le tout autour de trois mots-clés : prévention, coercition progressive et sensibilisation. «Nous aimerions également mettre en place un dispositif d'aide au sevrage tabagique», a précisé le conférencier. Des paroles séduisantes, si elles ne partent pas en fumée…