33 foyers de fièvre aphteuse ont été enregistrés dans 22 communes de la wilaya de Tizi Ouzou. 263 bovins sont atteints par ce virus. Devant la propagation exponentielle de la maladie, les éleveurs sont contraints d'abattre leurs bêtes. Depuis l'apparition de la fièvre aphteuse, la semaine dernière, dans la wilaya de Tizi Ouzou, un climat d'inquiétude s'est installé parmi les éleveurs de la région. Et pour cause, nombre d'entre eux ont perdu plusieurs dizaines de bovins. En quelques jours, 33 foyers de cette maladie ont été enregistrés dans 22 communes pour un total de 263 bovins atteints par le virus. Devant la propagation exponentielle de la maladie, les éleveurs sont contraints d'orienter leurs bêtes vers l'abattoir. Une rencontre avec certains de ces agriculteurs, plus que jamais dans l'incertitude face à leur avenir, et une virée dans quelques abattoirs de la wilaya nous renseignent sur l'ampleur des dégâts engendrés par cette maladie. Akli Fritih, jeune éleveur de bovins, qui dispose d'une exploitation à Laâzib Seklaoui (Timizart Loghbar), localité sise à 10 km à la périphérie nord du chef-lieu, est un des agriculteurs ruinés par cette maladie. Son cheptel, composé de 68 têtes – 38 vaches laitières, 12 velles, 11 veaux et 7 génisses – sera orienté vers l'abattoir. Abattu, il nous livre ses sentiments : «Aux premiers jours de l'apparition de la maladie, j'ai remarqué qu'une vache de mon cheptel était malade. J'ai fait venir le vétérinaire, qui a constaté que la bête était bel est bien contaminée par le virus de la fièvre aphteuse. Il a déclaré le foyer auprès des services de la subdivision agricole de Tizi Ouzou, suite à quoi j'ai reçu l'ordre d'abattre les bêtes de mon cheptel, toutes contaminées. Je suis consterné. En quelques jours, mon investissement réalisé au prix de beaucoup de sacrifices est parti en fumée.» «Même les aliments du bétail que j'ai stockés, dont 2000 bottes de paille et 1000 autres de foin d'avoine, vont être détruits parce qu'ils sont contaminés. Je suis ruiné, je ne sais pas quoi faire après ce drame», ajoute notre interlocuteur. Akli ne reste tout de même pas les bras croisés, il compte saisir les services agricoles et espère que la décision d'indemnisation prise récemment par le ministère de l'Agriculture sera effective. Manque de moyens et indisponibilité de vaccins Les vétérinaires, eux, sont sur le qui-vive. Ils dénoncent le manque de moyens matériels (tenues spéciales, produits de désinfection, etc.) S'agissant de l'opération d'approvisionnement en vaccin préventif contre la fièvre aphteuse, les éleveurs craignent que le produit n'arrive pas à temps. «Il s'agit d'une commande de fabrication d'un vaccin et non pas d'achat à partir de stocks», indique un responsable de l'inspection vétérinaire de la wilaya. Les services agricoles orientent les animaux atteints par la fièvre aphteuse vers les abattoirs assermentés. Une visite de l'abattoir de Tala Atmane, à 18 km au nord du chef-lieu de wilaya de Tizi Ouzou, nous a permis de constater le flux important de camions qui y apportent des bovins. Après l'abattage sanitaire de la bête, les viscères et la tête de l'animal sont enfouis alors que la chair, récupérée, est stockée dans une chambre froide pendant 48 heures, avant d'être orientée vers la consommation. Cependant, les capacités de stockage sont limitées. Un employé de cet établissement indique que pas moins de 50 bovins ont été abattus depuis l'apparition de la maladie. Sur place, un autre éleveur de Timizart nous fait part de son exaspération : «J'ai transporté deux vaches laitières, deux veaux et deux génisses pour les abattre.» Cet éleveur vient de payer les droits d'abattage, qui varient entre 1500 et 2000 DA pour chaque bête abattue. «C'est la mort des éleveurs», clame-t-il. La spéculation autour du prix de la viande est l'autre problème soulevé par ces éleveurs : «Nous ne savons pas à quel prix vendre aux bouchers. Bien que la viande soit comestible, les détaillants peuvent acheter au prix qu'ils veulent.» Et de regretter que les autorités ne soient pas intervenues pour acheter la viande et la vendre ensuite à des prix raisonnables. Baisse de la production laitière La fièvre aphteuse qui atteint les vaches peut influer sur la production de lait. Du coup, la filière est menacée par une pénurie tant que l'épidémie n'est pas résorbée. «Habituellement je produis 600 litres de lait par jour. Depuis que mes vaches sont atteintes par la maladie, je ne collecte que 110 litres», indique un jeune éleveur. Sur cette question, un vétérinaire explique que le virus aphteux affaiblit la vache au point qu'elle ne peut plus manger, ce qui induit une production laitière insignifiante. Même cas pour la viande des bœufs d'engraissement qui connaîtra une baisse sensible, ajoute-t-il.