Les Etats-Unis d'Amérique, qui ont sans doute inspiré la stratégie de la guerre menée par Israël contre le Liban, se sont révélés être de très mauvais élèves de l'histoire. Après avoir lamentablement échoué dans l'occupation de l'Irak et leurs chimériques calculs de gagner l'opinion irakienne à leur cause après la chute du régime de Saddam Hussein, les Américains récidivent et donnent leur onction aux Israéliens dans leur offensive militaire au Liban. Le gouvernement israélien expérimente lui aussi à ses dépens cette stratégie du pire élaborée dans des laboratoires et des officines qui puisent leurs informations et fausses certitudes auprès de valets locaux à sa solde. De faux prophètes dont les prédictions et les analyses sont souvent à mille lieues des véritables réalités des pays et des peuples dont on cherche à changer les destins. En agressant le Liban suivant un scénario évolutif qui consistait, dans un premier temps, à cibler les attaques sur les positions du Hezbollah et le sud du Liban, fief de la communauté chiite, en épargnant prudemment les régions à dominance chrétienne, druze..., l'armée israélienne n'a pas tardé à étendre son champ d'intervention pour déclarer une guerre totale au Liban. Aucune région, aucune communauté n'est désormais épargnée par la machine de guerre israélienne. Que s'est-il donc passé dans la tête de l'état-major israélien pour que l'offensive militaire, qui se voulait, au départ, ciblée et chirurgicale avec pour objectif, officiellement déclaré, de déloger le Hezbollah de la frontière israélo-libanaise et de récupérer les deux soldats de Tsahal capturés par le Hezbollah, ne soit plus limitée, ni dans le temps ni dans l'espace ? Convaincus de la difficulté objective de venir à bout de la résistance du Hezbollah qui, comme toute guérilla, est insaisissable et inscrit son combat dans la durée — l'exemple de la résistance irakienne qui donne du fil à retordre aux Américains est là pour le prouver —, les Israéliens jouent la carte du chaos généralisé du Liban dans l'espoir de provoquer un sursaut populaire et un fort sentiment anti-Hezbollah. Autrement dit, en attaquant les infrastructures vitales du pays, Israël espère retourner l'opinion libanaise contre le Hezbollah, en endossant la responsabilité de la tragédie libanaise à ce mouvement. « Nous sommes tous des Hezbollah », s'est écrié un Libanais, qui précise pourtant n'avoir aucune sympathie particulière pour ce mouvement. Symbole de la résistance, du martyr et défenseur de l'honneur bafoué du Liban face à une classe politique et un Etat démissionnaire qui n'ont que les larmes de l'impuissance à offrir comme riposte, le Hezbollah a gagné en quelques jours de conflit un capital de sympathie auprès de la population qui pourrait changer les équilibres politiques futurs dans le pays.