L'inauguration de la chaire Unesco d'anatomie numérique d'Alger, en partenariat avec l'université Paris-Descartes, a été saluée par l'ensemble de la société médicale algérienne. Désormais, grâce à la magie de l'informatique, les anatomistes algériens renouent enfin avec les tables de dissection…soit-elles virtuelles. La naissance d'une chaire est un événement marquant dans la vie d'un établissement universitaire. Ces hauts «sièges» du savoir académique sont souvent réputés par leur caractère avant-gardiste, consécrateur des sciences émergentes. C'est ainsi que le professeur Hammoudi, titulaire de la nouvelle chaire d'anatomie numérique d'Alger, envisage l'essor de la discipline anatomique ; un saut en avant qu'il espère «salvateur» pour une discipline en souffrance. Les anatomistes qui ont troqué, depuis les années 1980, leurs instruments chirurgicaux contre des bouts de craie sont désormais appelés à rejoindre le progrès par l'anatomie numérique, une science nouvelle qui vient remettre des outils pédagogiques «de pointe» entre les mains des enseignants de la discipline et ouvrir de nouveaux champs d'exploration pour la recherche. Il s'agit en fait d'une série de logiciels de modélisation tridimensionnelle capable de reproduire les organes anatomiques en volume et les manipuler grâce à des instruments virtuels. La source de données peut être une coupe sur sujet anatomique (cadavre) tout comme une imagerie scanner, IRM ou autre technique d'investigation numérique. Sur ces tables de dissection informatique, les sujets anatomiques se transforment en fantômes dont le corps allongé dans la cuve mortuaire de Paris-Descartes peut, d'un clic de souris, apparaître dans une salle de dissection d'Alger. D'où l'intérêt des bibliothèques virtuelles de modèles 3D, qui seront incessamment mises à la disposition des étudiants, résidents, chirurgiens et chercheurs algériens. Sur des programme tel que Osirix (un logiciel d'anatomie), les étudiants en médecine pourront effectuer des TD sur ordinateur. Disséquer, c'est désormais couper, coller, zoomer, effectuer un rotation. Mais aussi une myriade de fonctions pour segmenter, colorer ou attribuer une transparence. Selon le Pr Hamoudi, un nouveau partenariat est également en cours d'élaboration avec le doyen de la faculté de médecine de Nice, le professeur d'anatomie Patrick Baqué. Nous avons également appris que la nouvelle chaire numérique d'Alger s'engage, dans un avenir proche, à mettre en ligne sur son portail la totalité des cours prodigués en laboratoire pour qu'ils puissent être consultables par toutes les facultés du pays, ainsi que la liaison par téléconférence des salles de dissection et de l'amphithéâtre. A noter également la création prochaine d'un laboratoire de microchirurgie. «Plusieurs cycles d'initiation sont au calendrier pour enseigner aux étudiants en médecine et aux chercheurs algériens la manipulation de ces nouveaux outils informatiques» annonce le professeur Hamoudi. Ces formations seront dispensées par le professeur Vincent Delmas et son collègue le docteur Jean-Pierre Uhl, de l'université Paris-Descartes. Dans son allocution à l'occasion du cours inaugural, le professeur Delmas a vanté l'usage des nouvelles techniques informatiques pour des pratiques médicales, il a rappelé, devant les étudiants, au corps enseignant et aux doyens des faculté de médecine, le but que ces enseignements sont censés consacrer : approfondir la connaissance de l'anatomie, permettre une investigation plus pointue dans le diagnostic, ainsi que la recherche médicale. Mais il reste «l'indispensable confrontation avec la réalité par la dissection sur sujet anatomique», a conclu le Pr Delmas.