Coincé entre les deux mosquées (Djamaâ El Kebir et Djamaâ El Djedid), le bel édifice quadrilatère a été construit en 1892 pour y installer le palais consulaire. Erigé sur 4 niveaux, le bâtiment public épouse la nature urbaine, selon le schéma général de transformation de la voirie et d'alignements que l'administration coloniale met en place à partir de 1840. Les arcades de la façade principale, qui permet des échappées visuelles sur la mer, ouvrent sur un grand vestibule revêtu d'un tapis mosaïcal qu'éclairent trois verrières circulaires dans le comble. Aux murs et calottes des plafonds des salles, richement décorés de moulures, viennent s'ajouter des éléments architectoniques, dont certains servent de supports. La sculpture nous rappelle le caractère de l'activité commerciale de cette bâtisse à l'aspect monumental. Soulignons que ce beau fleuron architectural a vu défiler plusieurs institutions depuis l'Indépendance qui n'ont pas jugé bon d'en pendre soin, selon le directeur général de la CACI, Mohamed Chami, qui appelle à une prise en charge effective de ce patrimoine. Dans les années 1970 et 1980, des services du FLN, rappelle-t-il, avaient élu leurs quartiers dans les locaux de cet immeuble, non sans apporter des aménagements aussi choquants que grotesques qui ont dénaturé son état originel : fresques éliminées, parquet en bois des deux grandes salles altéré par la moquette, porte-fenêtres « éventrées » par le dispositif de la climatisation, pavage de mosaïque dégarni par endroits, murs hideusement peints, lignes de téléphone envahissantes. « Lorsque nous avons pris possession de ce patrimoine immobilier, il y a quelques années, nous avons entrepris une opération partielle de réfection à l'intérieur du bâtiment, mais le gros du travail reste à faire », ajoute notre interlocuteur. Aussi, une jeune équipe de l'Ecole des beaux-arts s'est mobilisée pour revêtir certaines parties du parterre en mosaïque. Lors du séisme du 21 mai 2003, l'édifice a été fortement secoué, causant des infiltrations d'eau suite aux fissures dans certaines parties et « l'arrachage » de pans du plafond central richement mouluré. L'ex-wali délégué de Bab El Oued, M. Kadi, mit du sien en enjoignant à ses services de faire « sauter » l'horloge et le fronton, justifiant par cette action, le souci de la primauté de la sécurité publique sur l'aspect culturel que revêt cette bâtisse, rappelle M. Chami. Autrement dit, une action irresponsable de la part de cet édile qui « supprima » l'ornement architectural en bas-relief couronnant la façade principale. Une photographie ancienne nous édifie sur le blason porté par l'image allégorique des deux statues, l'une exprimant la richesse et l'abondance, et l'autre symbolisant le glaive et la balance de la justice. « Depuis, des travaux de restauration ont été menés par un spécialiste du musée de Tipaza pour réhabiliter les œuvres d'art et les remettre à leur endroit, mais des responsables du secteur de la culture ont intimé l'ordre au restaurateur de ne pas poursuivre la tâche pour des raisons que nous ignorons », nous explique non sans dépit, Mohamed Chami qui, par ailleurs, interpelle les pouvoirs publics à prendre en charge la restauration de ce bel édifice architectural dans son ensemble, d'autant qu'il entre dans le tissu du secteur sauvegardé de La Casbah.