Si l'art est universel, un créateur a toujours besoin du regard des siens. On n'a pas beaucoup vu les œuvres de Silem en Algérie. Quand il y vivait encore, les galeries et les occasions d'exposer étaient rares. Et depuis qu'il est en France, soit depuis 1994, ses apparitions ici se comptent sur le bout des doigts, apparitions artistiques s'entend, car il ne manque pas de revenir assez régulièrement. Plutôt inaperçue, sa dernière exposition en Algérie remonte à 2013 et avait eu lieu à la salle d'expositions de la Bibliothèque populaire de Mostaganem. Auparavant, il s'était manifesté en 2006 à la regrettée galerie Arts en liberté, à Alger et, six ans plus tôt, à la Maison de la culture de Maâtkas (W. de Tizi Ouzou). Soit trois expositions assez discrètes en Algérie en près de quinze ans. Cela dit, beaucoup de plasticiens résidant dans le pays ne sont pas plus visibles, soit qu'ils ne produisent pas régulièrement, soit que les occasions ou conditions d'exposition ne leur sont pas favorables. Ali Silem étant parti au moment où il commençait à se faire connaître, la plupart des artistes des jeunes générations ne connaissent pas son travail, hormis de manière virtuelle, au croisement d'un site internet. Idem pour les amoureux de l'art, à l'exception des plus anciens. Voilà donc qu'il s'apprête à réapparaitre à Maghnia, là où depuis quelques années a lieu une belle expérience d'artistes que nous nous sommes attachés à soutenir pour son caractère original sinon unique. Pour rappel, c'est dans cette petite ville frontalière, devenue une impasse depuis la fermeture de la frontière avec le Maroc, qu'un collectif d'artistes a su convaincre les autorités locales de leur concéder l'usage de l'église abandonnée (et depuis restaurée) pour en faire un lieu d'art simplement dénommé Riwaq El Fen, soit la Galerie d'Art ou REF par abréviation. Ali Silem y exposera du 1er au 22 novembre avec vernissage le jour du soixantième anniversaire du Premier Novembre, à 11 h. Pour le collectif, cette exposition est perçue comme un «nouveau départ», l'occasion de renforcer et d'étendre les activités de cet espace culturel. Les projets ne manquent pas, semble-t-il, pour peu qu'ils puissent recevoir l'aide, d'ailleurs peu budgétivore, qu'ils nécessitent. Pour l'artiste, c'est d'abord une reprise de contact avec le public algérien et avec ses pairs, lui qui expose d'habitude en France ou en Europe. Si l'art est universel, un créateur a toujours besoin du regard des siens. Né à Sfisef en 1947, Ali Silem est sorti de l'Ecole nationale des beaux-arts d'Alger en 1975. Au milieu de ses études, il commence à exposer en groupe avant de se lancer en 1982 dans ses premières expositions personnelles. Très proche de Mohamed Khadda, il s'inspirera de sa démarche en développant un style personnel marqué par le graphisme et jouant sur l'électricité chromatique de la peinture à l'acrylique. Comme le maître disparu, Silem appartient aux rares peintres qui écrivent sur leur art et celui des autres, démultipliant leur pratique par la réflexion. Et avec lui aussi, il a partagé sa passion pour le monde de l'imprimerie. Intervenant fréquemment dans le monde de l'édition, il a illustré des œuvres poétiques et conçu des décors pour les dramaturges Abdelkader Alloula et Ziani Chérif Ayad.