Un bureau national d'investigation a été créé récemment par le commandement de la Gendarmerie nationale, a-t-on appris de source proche de cette institution. Constitué d'une unité d'élite spécialisée dans les domaines de la grande criminalité, de la drogue, de l'économie et du blanchiment, ce bureau dépendant directement du chef de l'état major de la Gendarmerie nationale, bénéficiera de tous les moyens pour mener des enquêtes commandées soit par le patron de l'institution ou le président de la République. Selon nos sources, il s'agit en fait d'un service autonome aux larges prérogatives, à l'image du bureau fédéral des investigations (FBI) aux Etats-Unis d'Amérique, appelé à intervenir dans n'importe quelle région du pays. L'idée d'une telle décision « a été mûrement réfléchie au sein du commandement de la gendarmerie, à la suite de nombreuses enquêtes remises ces dernières années sur son bureau par le président de la République. Le grand défi aujourd'hui est de faire face à une criminalité de plus en plus organisée qui nécessite des structures de lutte adaptées, très mobiles et bien entraînées pour intervenir dans toutes les situations », a indiqué notre source. Celle-ci a expliqué que la gendarmerie est depuis le recul du terrorisme très sollicitée sur le terrain. Ainsi, de grandes enquêtes, très complexes et assez lourdes aux implications multiples, lui ont été confiées par la présidence de la République. « Il y a eu d'abord l'affaire Khalifa, le détournement du foncier agricole, au niveau national, le naufrage du Béchar et à son bord 16 marins, sans oublier les affaires de dilapidation de deniers publics au niveau des banques étatiques. Ces dossiers ont été pour beaucoup dans la mise en place d'un bureau national d'investigations, du fait qu'ils avaient des ramifications au niveau de plusieurs régions du pays, et de ce fait, la collecte d'informations et surtout son traitement, puis l'intervention, prenaient beaucoup plus de temps. Avec une structure centralisée autonome et mobile, l'efficacité et la rapidité seront à coup sûr assurées... », a indiqué notre interlocuteur. Une structure très attendue Ce dernier a noté néanmoins que la création de ce bureau n'a rien à voir avec la dissolution du Service central de la répression du banditisme (SCRB), mis en place en 1991 par la Sûreté nationale, pour se consacrer à la lutte contre la grande criminalité. Pour lui, la nouvelle structure d'investigation aurait pu agir sur le terrain en toute harmonie avec celle de la Sûreté nationale. Les responsables de cette institution ont estimé que le service de la répression du banditisme n'avait plus lieu d'être, et que ses éléments très expérimentés seront plus utiles dans la lutte contre la criminalité en les mettant à la disposition des brigades de la police judiciaire, lesquelles, faut-il le rappeler, assument les mêmes missions. « Il est vrai que durant ces 15 années d'existence, ce service a eu à élucider de nombreuses affaires importantes ; néanmoins sur le terrain, il y a eu des dépassements du fait de sa large autonomie et de sa mobilité. Lorsqu'ils se déplaçaient, par exemple, à l'intérieur du pays, parfois et pour des raisons de secret de l'enquête, ils n'informaient pas les autres services qui pouvaient être eux aussi sur la même enquête. Cette situation a, de toute évidence, créé des divergences au sein des services de la Sûreté nationale, dont les responsables ont finalement été convaincus de la nécessité de dissoudre la structure et de renforcer les unités de la police judiciaire auxquelles ils ont donné plus de moyens notamment au niveau local pour éviter les chevauchements de responsabilités. La dissolution du SCRB était donc prévisible. C'était juste une question de temps.. », a expliqué notre source. Pour cela, a-t-elle noté, la Gendarmerie nationale « a bien réfléchi » aux avantages et inconvénients d'un bureau d'investigations, en mettant à profit les points forts et les points faibles de son homologue de la Sûreté nationale. Si pour l'instant tout le monde est d'accord pour affirmer qu'un tel service ne sera que bénéfique pour la lutte contre la criminalité organisée, de nombreux spécialistes ont estimé néanmoins que son succès sur le terrain dépendra non seulement des missions que lui assignent les plus hauts responsables du commandement de la gendarmerie, mais aussi du choix des hommes appelés à le diriger. « Si le bureau n'aura pas une large manœuvre de liberté dans le choix de ses enquêtes, la manière de mener les investigations, et le fait d'aller jusqu'au bout de leur quête de vérité, il sera tout simplement inefficace et pourrait être même utilisé à des fins politiques ou se transformer en instrument de règlement de comptes. Ce qui le discréditera et compromettra son existence.... », a noté notre interlocuteur, précisant que l'avenir de ce nouveau bureau dépendra également de la personnalité qui sera appelée à le diriger. « Ce genre de structures sont généralement commandées par des hommes de terrain, spécialisés dans la lutte contre la criminalité organisée pour avoir exercé pendant des années dans le domaine. Lorsque les responsables sont choisis parmi les administratifs ou les politiques, l'échec est garanti, car les objectifs et les missions assignés à ce bureau seront automatiquement détournés de leur vocation initiale, soit par incompétence, soit par la volonté des politiques... », a-t-il relevé. Il a conclu en disant que l'institution attend beaucoup de ce nouveau bureau.