Tandis que certains députés de l'Assemblée populaire nationale s'affairent à débattre du peu de lois qui arrivent chez eux, des parlementaires du FLN sont occupés à régler les conflits qui déchirent de plus en plus leur parti. La dissidence contre le secrétaire général du FLN, née du mécontentement créé par le nouveau découpage du parti, s'élargit pendant que Saadani, soucieux d'organiser un congrès sans encombre, tente de gagner du temps. Le premier responsable du FLN rencontrera aujourd'hui les députés de son parti, à l'hôtel El Aurassi, pour un ordre du jour qui n'a toujours pas été fixé.Les opposants à Saadani – qui évaluent leurs partisans à une centaine de personnes – estiment que cette rencontre vise avant tout à permettre au secrétaire général de jauger ses forces. «Il veut connaître qui est avec lui et qui ne l'est pas», tranche Maad Bouchareb, vice-président de l'APN, élu de Sétif. Pour expliquer sa thèse, le député, exclu récemment des rangs du groupe FLN par Saadani, s'interroge sur le choix du lieu de la rencontre. «C'est une rencontre qui peut se tenir au siège du FLN ou ici à l'APN», avance-t-il. «C'est faux», réplique Tahar Khaoua, président du groupe parlementaire du FLN. Pour lui, le choix d'El Aurassi est justifié par la présence des députés et sénateurs «convoqués pour discuter des lois à venir et, surtout, de la prochaine révision de la Constitution». Interrogé sur la possibilité de voir émerger un nouveau groupe parallèle, Tahar Khaoua élude la question d'un revers de la main : «Cela est l'impossible rêve de Abderrahmane Belayat. Puis, ceux qui se mettent en dehors du groupe parlementaire risquent de ne pas assister au prochain congrès. Et cela, personne ne le veut.» L'enjeu de la rencontre d'aujourd'hui est, en effet, l'affluence. Car, pour beaucoup de parlementaires, la présence à cette kermesse de Saadani équivaut à une caution à sa démarche. «Nous ne sommes pas concernés par cette rencontre», tranche Maad Bouchareb, tandis que son collègue de Bordj Bou Arréridj, M'hamed Dissa, est formel : «La majorité des députés n'iront pas à El Aurassi.» Vrai au faux ? Il est difficile de répondre à la question. Mais les deux camps jouent leur crédibilité sur le nombre de présents. Et pour tenter de ratisser large, Saadani a dépêché, hier, Sadek Bouguettaya, membre du bureau politique chargé des relations avec le Parlement, pour tenter de convaincre les récalcitrants d'assister à la rencontre d'El Aurassi. Un signe de panique. Lutte pour le pouvoir La fracture entre pro et anti-Saadani est telle que ce dernier aurait demandé aux députés encore fidèles de ne pas assister à la séance de la présentation, lundi dernier, de la loi sur la modernisation de la justice. Le texte est présenté par le ministre de la Justice, un des adversaires du moment de Saadani. Et cela n'a pas raté. Le président du groupe parlementaire du FLN, Tahar Khaoua nie toute instruction en ce sens, évoquant notamment le «soutien du FLN au programme du président de la République». «Pour nous, Tayeb Louh est un ministre de la République. Et à partir du moment où il représente le gouvernement, nous le soutenons», dit-il. Et lorsque la question de l'absence quasi totale des députés de son parti est posée, il répond que «les parlementaires ne sont pas tenus d'être présents lorsqu'il n'y a pas adoption d'une loi». Cela est vrai. Sauf que lorsque le lendemain, la ministre de la Poste et des Technologies de l'information et de la communication a présenté la loi sur la signature électronique, les députés du FLN ont été beaucoup plus nombreux que la veille. Ce qui accrédite la thèse du boycottage. Cette nouvelle lutte de clans au sein du vieux parti cache des intérêts inconnus. Certains courent derrière des postes, tandis que d'autres visent plus loin. A commencer par une future élection présidentielle. Une chose est certaine : «Le FLN ne peut pas vivre sans conflits internes.» C'est la sentence d'un député, militant depuis plus de 40 ans.