Le maire de Bordj Menaïel a fait l'objet, samedi dernier, d'un attentat juste devant chez lui. Un individu armé a usé d'une arme automatique pour attenter à sa vie ne l'atteignant heureusement que de deux balles à la jambe. Avant lui, de nombreux autres élus et autres responsables locaux avaient eu à subir la barbarie des groupes terroristes : I'ancien délégué exécutif communal (DEC) de Tidjelabine, le maire de Si Mustapha en 2002, celui de Ammal en septembre 2005, le président de l'APC de Benchoud le printemps dernier… Cela a créé une situation de psychose chez cette catégorie de responsables devenue une proie facile et rêvée des criminels. D'un autre côté, les élus sont constamment soumis à la pression qu'exercent sur eux différents cercles. Lorsqu'il leur arrive de se « tromper » l'épée de Damoclès ne tarde pas à leur fendre le corps. Six élus à l'APC de Tidjelabine croupissent dans les geôles depuis janvier dernier en attendant l'instruction de leur affaire qui, de prime abord, semble banale. L'un d'eux a eu le malheur d'apprendre du fond de sa cellule que sa femme est immobilisée et que son fils se trouve entre la vie et la mort suite à un accident de la circulation. Les cinq élus n'avaient eu de cesse de dénoncer ce qu'ils considéraient être contraire au bien de la collectivité : des « malversations multiples à l'APC, dont falsification des délibérations portant location du marché de voitures », ne cessaient-ils de répéter à l'adresse de différents responsables. La police en perquisition chez l'un d'eux aurait découvert en sa possession un cachet de la mairie qu'il aurait « utilisé frauduleusement » et l'on accuse le groupe d'avoir imité la signature du secrétaire général de l'Apc dans divers documents. L'instruction du dossier se poursuit, mais les concernés réfutent toutes les accusations portées contre eux soutenant qu'ils sont « victimes d'un complot qui vise à protéger des parties qui se sont rendu coupables de nombreux délits ». En attendant que la justice fasse toute la lumière sur l'affaire de Tidjelabine, les mis en cause ont toujours soutenu n'avoir commis aucune entorse à la loi. « Le cachet n°12 trouvé sur A. Taâmalt lui avait été remis en contrepartie d'une décharge et a fait l'objet d'une affaire en justice qui s'est terminée en sa faveur vers la fin de l'année 2004. Il est, en outre, facile de vérifier si la griffe du SG de I'APC que celui-ci prétend avoir perdue lors du séisme de mai 2003 avait continué à être utilisée entre cette date et mars 2005 lorsqu'il a commencé à utiliser sa nouvelle griffe. Sans vouloir me mêler du travail de la justice, j'ai la ferme conviction que ces gens sont innocents et je suis confiant quant à l'aboutissement heureux de cette affaire », témoigne un militant politique local. Position inconfortable En attendant la tenue du procès, une autre enquête touchant essentiellement aux sujets de plainte de ces élus, la gestion des affaires de l'APC, est en train d'être menée et l'on s'attend à ce qu'il y ait des révélations fracassantes. L'envoi d'une inspectrice de la Fonction publique par les autorités de la wilaya « pour renforcer les responsables locaux (APC) afin de leur permettre de mieux gérer la situation », soutient-on, est perçu par la population de Tidjelabine comme « une suite du travail d'investigation ». Ces cas d'assassinat et d'emprisonnement renseignent sur les dangers qui guettent les élus que beaucoup de leurs concitoyens voient, à tort ou à raison, accéder facilement à la richesse, aux affaires, aux privilèges. Ils se retrouvent dans une position d'autant plus inconfortable qu'ils viennent d'être dessaisis des dossiers les plus importants de la gestion des affaires de la collectivité, à savoir le foncier et le logement. « L'élu n'est plus que l'ombre de lui-même. La preuve c'est qu'il peut être révoqué par un fonctionnaire de l'Etat. Et c'est toute la volonté populaire qui est ainsi remise en cause. Nous nous retrouvons ainsi entre l'intransigeance de nos concitoyens, la menace terroriste, les risques de se tromper que multiplie le manque de formation dont nous souffrons pour nous retrouver en taule… Bref, entre le marteau et l'enclume, avec en outre, les soupçons qui pèsent sur nous et les accusations qu'on nous collera toute la vie », témoigne un P/APC, qui a requis l'anonymat. Il demeure bien entendu que tous les élus ne sont pas des anges. Comme ils ne peuvent pas être des « diables » dans leur intégralité. « Il faut une loi qui imposerait une surveillance, certes accrue, de la part de l'administration et de la société civile, en même temps sans que les prérogatives des élus ne soient diminuées, mais aussi un programme de formation au profit des responsables locaux. Seul procédé à même de permettre à ces derniers de rester dans les limites du légal », ajoute notre interlocuteur.