Comme en 2008, le gouvernement avait commencé par affirmer que l'Algérie ne serait pas touchée par la crise mondiale (financière au départ, et économique ensuite), et comme en 2008, l'Algérie a été rattrapée. Le dernier Conseil des ministres présidé par le chef de l'Etat a sonné le glas pour l'ère des largesses. Abdelaziz Bouteflika a instruit le gouvernement pour une rationalisation de la dépense, des importations et de la consommation d'énergie, tout en maintenant les projets d'investissement public et la même politique des subventions. En 2014, l'économie algérienne n'a fait que confirmer une tendance qui commençait déjà à être observée en 2013. Pourtant, la Banque d'Algérie prévenait déjà à l'époque dans sa note de conjoncture que si l'économie algérienne était résiliente grâce à une «faible exposition financière extérieure, à un niveau élevé des réserves de change et une flexibilité de leur taux de change, elle subit néanmoins l'effet des autres risques pesant sur les perspectives à court terme de l'économie mondiale à travers notamment le prix du pétrole.» Les prix du pétrole ayant perdu plus de la moitié de leur valeur en 2014, c'est le plus normalement du monde que l'économie nationale en ressente les effets négatifs. Les statistiques douanières relatives aux onze premiers mois de l'année l'attestent. L'excédent de la balance commercial a chuté de près de 40% en un an, les exportations des hydrocarbures de près de 2%, alors que les importations ont augmenté de plus de 6%. En 2014, les ponctions faites sur les ressources du Fonds de régulation des recettes ont augmenté, tandis que les réserves de change ont baissé à moins de 190 milliards de dollars. Alerte Le Fonds monétaire international (FMI) a lui aussi tiré la sonnette d'alarme. Le conseil d'administration du Fonds, en conclusion des ses consultations avec l'Algérie le 1er décembre dernier, publiait une note qui rejoignait celle de la Banque d'Algérie et de bon nombre d'experts économiques. «L'Algérie continue à avoir d'importantes marges de manœuvre sur les plans extérieur et budgétaire, mais les menaces qui pèsent sur la stabilité macroéconomique s'accentuent. Pour la première fois en près de 15 ans, le compte des transactions courantes devrait se solder par un déficit», soulignait l'institution financière internationale. Celle-ci projetait même une hausse du taux de chômage par rapport à 2014 à 10,4% contre 9,8% en 2013. Certains indicateurs économiques étant retombés dans le rouge, le gouvernement qui avait dans un premier temps rassuré quant aux effets de la baisse des cours sur l'économie a fini par se rendre à l'évidence. Le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, a déjà indiqué que les recrutements dans la fonction publique seraient gelés en 2015, tout en rassurant sur le fait que «le niveau de vie des citoyens» ne serait pas touché. Le FMI a pour sa part laissé entendre dans ses prévisions pour 2015 que les réserves de change seraient encore allégées d'une quinzaine de milliards de dollars. Certains économistes, à l'image de l'ancien gouverneur de la Banque centrale d'Algérie (BCA), Abderrahmane Hadj Nacer, n'écartent pas le retour de l'Algérie à l'endettement auprès du FMI. Dans le doute s'abstenir. Le gouvernement a convenu qu'il ne serait pas raisonnable de lancer de nouveaux projets, en revanche tous ceux qui sont déjà inscrits dans son programme seront maintenus. Solidarité Après 15 ans de dépenses démesurées et de gabegie, le gouvernement en appelle aujourd'hui aux citoyens pour «faire de l'année 2015 une année de solidarité». Les subventions des produits de large consommation ne seront certes pas touchées, mais les consommateurs devront plus que jamais faire preuve de rationnement dans leur mode de consommation, notamment en matière d'énergie. L'augmentation de la consommation énergétique interne est d'ailleurs l'une des raisons de la baisse des exportations en volumes du gaz algérien qui se sont considérablement réduits ces dernières années. En 2013 déjà, les quantités d'hydrocarbures exportées avaient baissé de plus de 7% par rapport à l'année précédente. Outre les citoyens, le gouvernement est lui-même appelé à opérer des coupes dans son budget de fonctionnement, instruit par le chef de l'Etat. L'exécution des budgets d'équipements devra, quant à elle, être plus rigoureuse, notamment en matière de maîtrise des coûts. L'autre mesure pour faire des économies réside dans la maîtrise des importations de biens et de services dont l'emballement, ces dernières années, a dépassé tous les records à près de 60 milliards de dollars. Le programme quinquennal 2015-2019 est quant à lui maintenu, même si l'on ignore pour l'instant si l'évolution des cours du pétrole à moyen et long termes permettra cette énième fantaisie.