C'est un serpent de mer dont on parle depuis la fin des années 1980. Cette fois-ci devrait être la bonne : le gouvernement promet un nouveau découpage territorial pour la fin du premier semestre. Qu'est-ce qui changera dans notre quotidien ? Pas grand-chose. Explications. - Pourquoi le nouveau découpage administratif refait surface maintenant ? Après le Conseil ministériel restreint, consacré au développement dans le Sud et les Hauts-Plateaux, le 27 janvier dernier, présidé par Abdelaziz Bouteflika, le Premier ministre Abdelmalek Sellal a annoncé que le découpage administratif allait se faire en trois étapes. «La crise sociale qui touche le grand Sud sur le dossier du gaz de schiste a imposé que l'opération soit lancée en premier lieu dans cette zone durant le premier semestre», explique un cadre proche du dossier. En 2016, ce sera au tour des wilayas des Hauts-Plateaux. Suivront, en 2017, les wilayas du Nord. En résumé, 46 nouvelles wilayas déléguées seront créées d'ici 2017, si l'opération se déroule comme prévu. - Quels sont les paramètres qui définissent la nouvelle wilaya déléguée ? Dans les wilayas du Sud, le premier critère est l'étendue. «Le but est de réduire la distance entre l'administration et le citoyen, par exemple, entre le chef-lieu de la wilaya d'Adrar et la daïra de Bordj Badji Mokhtar, il y a plus de 700 kilomètres. Pour qu'un citoyen de BBA se rende à Adrar, il lui faut entre 8 à 10 heures de route. Avec le nouveau découpage, il restera à BBA.» Mais à l'unique condition que cette wilaya déléguée ait des prérogatives... Ce qui n'est pas sûr. «Pour les wilayas du Nord, le critère principal est le nombre d'habitants dans les daïras. En théorie, insiste le cadre. Car en pratique, le découpage s'est fait aussi en fonction d'affinités. Par exemple, dans la wilaya de Tizi Ouzou, c'est Azazga qui devait devenir wilaya déléguée. Mais sur pressions d'un capitaine d'industrie connu et influent, c'est Azeffoun qui a été choisie.» - Cette nouvelle carte améliorera-t-elle nos relations avec l'administration ? Pas vraiment. Le problème de la centralisation persistera toujours, car plusieurs services ne peuvent pas être décentralisés pour le moment. On peut citer la Direction de la réglementation et de l'administration générale (DRAG), un des plus sollicités par les citoyens, et les organismes pour l'obtention d'autorisation ou d'agrément. «Pour décentraliser ce service, il faut au moins un ou deux ans de travail, car il fonctionne en relation avec de nombreux autres départements, comme les services de sécurité, les autorités locales, etc., poursuit notre source. Dans le cas des wilayas du Sud, cela s'annonce encore plus compliqué, car la décision a été prise d'urgence. Pour qu'une association de wilaya obtienne son agrément, elle doit déposer son dossier dans la wilaya déléguée, mais c'est la Drag de la wilaya ‘mère' qui doit donner l'autorisation. Au final, ce n'est qu'un relais entre les deux administrations.» - Qu'est-ce que cela va changer pour nos impôts ? Rien. La question des impôts reste un problème pour les wilayas puisqu'ils sont tous centralisés à Alger. Un plan de décentralisation est à l'étude, pour qu'un important pourcentage des impôts reste dans les wilayas où ils sont payés. Mais pour les wilayas déléguées, ce ne sera pas facile car il faut créer dans chaque wilaya une direction d'impôts, et beaucoup d'autres organismes fiscaux pour pouvoir les gérer. Pour résumer, les impôts vont continuer à dépendre des «anciennes» wilayas. - Quelles prérogatives pour ces super-daïras ? Ce n'est pas encore très clair. La cellule mise en place au sein du ministère de l'Intérieur a reçu pour le moment 25 walis en activité afin de les consulter sur les questions du fonctionnement et des prérogatives, venus au départ pour des réunions sur le développement local. «Nous n'avons pas eu le temps nécessaire pour élaborer un véritable code de wilaya spécial car, encore une fois, c'est la crise dans le Grand-Sud qui a accéléré l'opération, pourtant prévue depuis longtemps», indique une source officielle à El Watan Week-end. Dans la capitale, il existe depuis plusieurs années des wilayas déléguées telles que Hussein Dey ou Baraki mais dans les faits, elles ont les mêmes prérogatives que les daïras. Seule certitude pour le moment : certaines daïras, sur les 548 existantes, vont devenir des wilayas déléguées à l'intérieur desquelles seront créées de nouvelles daïras. «Pour créer une wilaya avec tous ses services, il faut des budgets considérables, des recrutements en masse ainsi que des infrastructures à bâtir, rappelle notre interlocuteur. De plus, la vraie question demeure l'organisation d'élections locales et législatives, car automatiquement, de nouvelles communes vont être créées.»