L'expert pétrolier Pierre Terzian, directeur de Pétrostratégies, a plaidé pour de nouvelles alliances entre pays exportateurs de pétrole, à l'image de ce qu'a entrepris l'Algérie depuis quelques semaines pour tenter de trouver une issue à la chute des prix du pétrole. Une chute enclenchée au mois de juin 2014 et dont la cadence s'est accélérée dans le sillage de la décision de l'OPEP, prise le 27 novembre dernier, de ne pas réduire sa production malgré une offre surabondante. Pierre Terzian, qui s'exprimait hier lors d'une conférence-débat intitulée «Le prix du pétrole : les tenants et les aboutissants de la crise» animée au siège de Sonatrach, a estimé important «d'élargir le cercle des alliances» en vue de se concerter et trouver une issue à la vulnérabilité de l'OPEP. Selon M. Terzian, l'organisation perd de plus en plus de parts de marché et la plupart de ses membres ont un problème de baisse drastique de revenus et doivent tenter de redresser la barre, contrairement à l'Arabie Saoudite qui est à l'origine de la décision de maintien des quotas préjudiciable à l'organisation et dont l'économie est loin d'être fragilisée par la baisse des revenus étant donné ses énormes réserves qui la placent dans une sorte de «zone d'indifférence». Pour l'expert, qui estime que «l'on est dans une situation d'après-pétrole-OPEP», il est encore heureux que l'Arabie Saoudite n'ait pas décidé d'augmenter ses capacités de production et ses investissements dans ce créneau, car une telle démarche aurait signifié que «la chute peut devenir durable». Le manque d'investissement de la part de l'Arabie Saoudite est donc plutôt - bon signe pour le marché du pétrole, selon l'expert qui, sans donner de prévisions précises sur la courbe des prix, semble optimiste quant à un rebond progressif des cours du pétrole à moyen terme. Il a notamment dit : «Je ne pense pas que le niveau actuel des prix soit durable, sinon on irait droit vers une catastrophe.» Et d'ajouter : «J'ai des doutes sur la réussite de la stratégie de l'Arabie Saoudite», expliquant, par exemple, que pour réussir le pari sur la baisse de la production du non-conventionnel américain, invoqué par l'Arabie Saoudite, il faudrait que les prix restent à un niveau bas pendant très longtemps, ce qui n'est pas envisageable au vu des données actuelles. L'expert parie, par ailleurs, sur un rebond de la demande, notamment aux Etats-Unis, comme cela s'est déjà produit lors de crises précédentes. M.Terzian fait remarquer également que les compagnies pétrolières ont fait savoir ces dernières semaines qu'«elles ne croient pas à la persistance des prix bas». Des indices qui renforcent, selon lui, l'hypothèse d'un scénario moins catastrophique que celui ébauché par les analystes suite à la dégringolade des prix, il y a encore quelques semaines. A propos de l'effet néfaste de la chute des prix du pétrole sur la Russie – dont le pétrole constitue 68% des recettes d'exportations et 50% du budget de l'Etat –, Pierre Terzian pense que les Etats-Unis et leurs alliés sous-estiment la réaction de la Russie et connaissent mal la mentalité des dirigeants de ce pays qui, au vu des pressions extérieures qu'il subit, «n'est pas du genre à se laisser faire et à abdiquer malgré les pertes financières dues à la chute des cours du pétrole conjuguées aux sanctions occidentales».