Les échanges comiques entre Amar Saadani (chef du FLN) et Louisa Hanoune (leader du Parti des travailleurs) prouvent, encore une fois, que le théâtre de la politique algérienne est entré dans une phase de délire surréaliste. Sinon, comment comprendre que Saadani et Hanoune, qui font partie du cercle, en apparence soudé, des partisans du président Bouteflika, se livrent en spectacle dans un pays qui plonge dans la mélancolie !? La même Hanoune a attaqué le président du Forum des chefs d'entreprises (FCE), Ali Haddad. Et Haddad, qui s'est adapté à la lumière des projecteurs et au son des micros, a répliqué à la responsable du PT. Sommes-nous devant une immense comédie pour meubler les vides laissés par le blocage des institutions ? Ou s'agit-il d'un début de mouvement à l'intérieur du statu quo de l'arrière-scène ? Tout est possible dans la scénographie actuelle de l'Algérie de Bouteflika IV. On a comme l'impression que le jeu de l'ombre a repris de plus belle et que la tour de contrôle s'est enveloppée de brouillard. Dans le grand cercle des soutiens politiques du chef de l'Etat s'est constitué un petit cercle, hermétique, dense, prémunissant contre toute fuite. Un cercle qui concentre des pouvoirs d'argent et d'administration et qui veut régenter la vie nationale à sa manière et selon son propre agenda et ses codes. A partir du centre névralgique de ce groupe, les attaques contre l'opposition sont menées au nom de la défense de «la stabilité de l'Algérie» et de «la légitimité des institutions». Et c'est sous le couvert de ce groupe que de belles affaires sont conclues à l'ombre de l'impunité et sous le voile impur de l'austérité. Un lobbying insonore est conduit par des hommes qui «investissent» dans l'absence prolongée du président de la République de la vie publique et dans la neutralisation des instances légales de contrôle pour fructifier les contrats, notamment avec des partenaires étrangers. Tout ce qui se passe autour de l'industrie, du commerce, des transports, de la téléphonie mobile et de l'agriculture est lié à cette «volonté» de «privatiser l'Etat» par tous les moyens, y compris par l'invention de complots, les écrans de fumée et les fausses polémiques. Cette situation anormale fait que les autorités refusent des débats ouverts et francs sur l'exploitation du gaz de schiste, sur l'utilisation des recettes pétrolières, sur l'endiguement des importations, sur le modèle énergétique, sur le système éducatif, sur l'évasion fiscale, sur la spéculation immobilière, sur la diversification des partenaires économiques et sur le développement de l'agriculture et de l'industrie. Certains attendent le troisième acte de la comédie Saadani contre Hanoune mais, visiblement, le scénariste n'a plus d'idée.