Le musée national du Bardo, dans la proche banlieue de Tunis, a été, hier en milieu de journée, la cible d'une attaque perpétrée par deux terroristes qui ont assailli les touristes en visite au musée. 22 personnes ont été tuées. Le chef du gouvernement tunisien, Habib Essid, a annoncé, hier vers 16h, la fin de l'opération terroriste qui a ciblé le musée national du Bardo. Selon M. Essid, deux terroristes en tenue militaire sont entrés au musée, alors qu'un bus transportant une centaine de touristes venait de stationner sur le parking. Les deux individus déguisés se sont approchés du bus et ont ouvert le feu à l'aide de fusils-mitrailleurs, poursuit le chef du gouvernement en relatant la constitution des faits. Les deux assaillants ont continué à tirer sur les touristes qui essayaient de s'enfuir, jusqu'à l'intervention des forces de l'ordre qui les ont abattus. Les chiffres officiels parlent de 22 morts, pour la plupart des touristes étrangers. Les deux autres victimes sont tunisiennes ; il s'agit d'un policier et d'un civil tandis que les deux assaillants ont été abattus. Le ministre de la Santé, Saïd Aïdi, a fait état par ailleurs de 38 blessés, notamment des ressortissants de France, d'Afrique du Sud, de Pologne, d'Italie et du Japon. Les touristes présents étaient arrivés le matin même, à bord d'un navire de croisière qui faisait escale à Tunis. Il s'agit du premier attentat terroriste de cette dimension au centre de Tunis et à quelques dizaines de mètres d'un symbole de la souveraineté, l'Assemblée des représentants du peuple, qui partage le même espace que le musée. Les riverains n'en reviennent pas. «Il s'agit d'un véritable carnage. Ceux qui font cela ne sont pas des musulmans», ne cesse de répéter Ali, jardinier à l'ARP, qui a assisté à la scène. Le quadragénaire était encore sous le choc, lorsqu'il a été interrogé par les médias. «La montée du terrorisme dans le pays durant les trois dernières années n'a pas eu d'impact sur la vie quotidienne des Tunisiens qui continuent à vivre paisiblement. C'est pourquoi il y a un tel choc», explique Meher, un journaliste présent sur place. Les Tunisiens sont sous le choc. Pour rassurer la population, le président, Béji Caïd Essebsi, a assuré que la Tunisie va tout faire pour empêcher de nouvelles attaques. «Les autorités ont pris toutes les mesures pour que de telles choses n'arrivent plus», a-t-il dit après avoir rendu visite aux blessés à l'hôpital Charles-Nicolle de Tunis. «J'espère qu'avec les moyens dont nous disposerons nous deviendrons plus performants (...). Toutes les autorités sont averties et j'espère qu'un tel désastre n'arrivera plus», a déclaré le président tunisien après ce «crime horrible». Béji Caïd Essebsi a souligné, en outre, que ce défi était le même pour toute la région. Evoquant le chaos en Libye voisine où le groupe Etat islamique est actif, il a déclaré : «Nous nous attendions à une action d'un degré élevé» en Tunisie aussi. Important traumatisme En plus de l'important traumatisme qu'il a causé en sein de la population, l'attentat d'hier risque de porter un nouveau coup au tourisme et donc à l'économie du pays. Une économie qui a déjà bien du mal à reprendre sa vitesse de croisière. Le musée où s'est déroulée la tuerie est l'un des plus touristiques du pays. Il abrite une exceptionnelle collection de mosaïques, dans un bâtiment mitoyen du Parlement. Installé dans un palais du XIXe siècle, il accueille des centaines de milliers de visiteurs chaque année. En 2005, le musée du Bardo avait été visité par 600 000 personnes. Cette attaque «vise notre économie», a d'ailleurs déclaré Mohsen Marzouk, le conseiller politique du Président, en faisant allusion à l'importance du secteur du tourisme pour la Tunisie. Il faut savoir qu'en Tunisie, le secteur touristique contribue de 7% au PIB et compte près de 400 000 emplois directs et indirects (environ 12% de la population active). En 2014, les recettes touristiques avaient enregistré une légère croissance, tout en restant loin des niveaux de 2010. C'est-à-dire avant la révolution. L'an dernier, le tourisme a rapporté 1,59 milliard d'euros au pays, soit 6,4% de plus qu'en 2013 mais 14,5% de moins qu'en 2010, selon les statistiques du ministère du Tourisme. Le nombre de touristes a, quant à lui, baissé de 3,2% à 6,07 millions contre 6,27 millions en 2013. Eu égard donc à l'extrême importance de ce secteur stratégique pour la survie de l'économie tunisienne, l'urgence sera, pour Béji Caïd Essebsi et le gouvernement de Habib Essid, de sauver la nouvelle saison touristique. Mais pour que les touristes continuent à venir, il faudra leur donner la preuve de leur maîtrise de la situation sécuritaire du pays. Consciente de tous ces enjeux depuis déjà de longs mois, la population a juré de ne pas plier face au terrorisme.