Après des expositions similaires consacrées à des artistes ou encore à l'histoire de la mosquée El Kébir de Jijel, Djamel-Eddine Hadji est revenu cette fois-ci pour revisiter l'histoire de la Médarset El Hayat. Ainsi, la célébration de la journée de Youm El Ilm qui coïncide avec le 16 avril, date anniversaire de la disparition de Cheikh Abdelhamid Benbadis, a été l'occasion d'organiser dans le hall de mairie de Jijel une exposition de photographies et de documents qui retracent la naissance de la Médarset El Hayat, initiée sous la houlette de l'association des Ouléma musulmans et construite avec les contributions de bienfaiteurs et des dons de la population locale. Selon la déclaration publiée dans le journal officiel du 12 juillet 1933, celle-ci a été faite le 20 juin 1933 à la sous-préfecture de Bougie. L'association dénommée Médarset El Hayat, avait pour but de «faciliter l'enseignement de la langue arabe, de la théologie, du droit musulman et aider à l'éducation morale et religieuse et à l'évolution des Musulmans». Le premier siège social, avant la construction de la mythique Médersat, quelques années plus tard, se trouvait à l'angle des rues Picardie (Larbi Ben M'hidi actuellement) et Leroux (20 Août 1955). Le premier président de l'association a été Abdelhafid Khellaf dit Messaoud (1897-1973). La naissance de l'association a été accueillie avec enthousiasme par la population locale si bien qu'en 1937, le nombre d'élèves s'élevait à 46. L'élan de cette école musulmane dirigée par le cheikh Mohamed-Tahar Sahli (1904 – 1990) qui a côtoyé le cheikh Benbadis et l'association des Ouléma, est stoppé par le débarquement des troupes anglo-américaines le 8 mai 1942, le local étant réquisitionné. L'association a été tout de même suivie par les renseignements généraux et c'est ainsi que dès le mois de décembre 1933, le commissaire de police de Djidjelli (Jijel) écrit un rapport dans lequel on peut lire que «contrairement au règlement sur l'enseignement privé des indigènes, le local affecté à cette école servait de lieu de réunions publiques», ou encore cette lettre du maire daté du 9 juin 1934 dans laquelle M. Lochard expliquait au sous-préfet que « le but véritable poursuivi par l'association Médarset El Hayat est certainement politique, mais comme les dirigeants cachent soigneusement leurs intentions, et ont une attitude correcte, que d'autre part leurs réunions ne causent aucun trouble, je suis d'avis de tolérer avec une surveillance attentive ». Un début avec deux classes Après l'acquisition d'un terrain (actuel musée construit dans la cour de l'ex-médersa) en 1937, la construction a démarré après une quête pour rassembler les moyens financiers nécessaires. Le cheikh Abdelhamid Benbadis assiste en personne à la pose de la première pierre en 1939. Les travaux sont achevés en février 1940. L'école comporte deux classes. La construction d'une troisième classe est décidée par la suite. Au premier trimestre 1944, le nombre d'inscrits atteint 360. Suite aux évènements du 8 mai 1945, la Médersa est fermée le 25 mai par les autorités coloniales et ses documents saisis. La reprise des activités n'interviendra qu'au lendemain de l'amnistie de 1946. En 1955, et suite au succès de la première école «indigène», une seconde école est lancée dans un terrain séparé de la première médersa juste par la route. Le Cheikh Sahli intercède auprès de Cheikh Bachir Ibrahimi pour lancer une quête au profit de cette extension de la médersa. L'école est investie une seconde fois par les militaires en 1956, qui y resteront jusqu'en 1962. Ironie du sort, ce lieu dédié au savoir est transformé par les militaires français en centre de torture du sinistre 2ème bureau. A l'indépendance, la médersa reprend sa vocation et est transférée au profit de l'éducation nationale. Si la seconde école (aujourd'hui école Chahid Mohamed Boumaza), dispense toujours un enseignement dans le cycle primaire, l'historique médersa a été – au grand regret des milliers de ses anciens élèves et enseignants encore en vie – transformée en musée, dont la ridicule extension, du point de vue architectural relève purement de l'art «quand-on-ne-peut-rien» contrairement au style arabo-mauresque de l'ancienne médersa.