L'Institut de formation des cadres de la jeunesse de Tixeraïne (Alger) a abrité six jours durant — du 23 au 28 août 2006 — un regroupement d'enseignants de langue française, tous cycles confondus (primaire, moyen et secondaire). Au-delà de la cohabitation des trois catégories d'enseignants, l'inédit dans la formule de cette université d'été réside dans l'implication directe des enseignants. Ils n'ont été ni convoqués ni invités : ils ont assumé leur participation de leur poche. Ils sont même à l'origine du choix des thèmes abordés. La formation à la carte en quelque sorte.Juste pour s'acquitter du devoir de se former. Et cerise sur le gâteau : la sympathique présence de retraités — des femmes en majorité — qui ont gardé intact le feu sacré de la passion d'enseigner. Venus des quatre coins du pays (Sud, Hauts-Plateaux et Nord), ces éducateurs ont pris en charge leur transport et cotisé en sus pour honorer les frais d'hébergement dont une grande partie est supportée par le service culturel de l'ambassade de France. Des sacrifices qui en disent long sur leur motivation. Il est utile de souligner que ces fonctionnaires du secteur de l'éducation nationale sont tous des adhérents d'associations pédagogiques de wilaya (Association des enseignants de langue française). Ils activent depuis quatre ans dans le domaine passionnant de la recherche-action sous la férule de l'Association nationale des enseignants de français (Anef), coordinatrice à l'échelle des wilayas. A leur actif une série de regroupements régionaux et nationaux où la pratique de la classe ainsi que les programmes officiels sont passés au crible de la critique. Une véritable université itinérante financée en partie par les cotisations des adhérents et que couve un brillant retraité de la ville d'Oran. Trop jeune pour être inactif, M. Abboub se donne à fond. Dans son travail/sacerdoce, il est secondé par des collègues en activité tout aussi passionnés. Pour l'édition présente, les commodités étaient loin d'être au rendez-vous. De quoi décourager les plus aguerris. Malgré ce handicap de départ, ces mères et pères de famille n'ont pas renoncé à la besogne. Dès leur arrivée, ils ont plongé dans l'ambiance qui sied à ce type de rencontre : sérieux, convivialité et assiduité. Encadrés par des experts dont certains sont venus de France — dont une tunisienne expatriée —, les séminaristes ont planché sur des activités innovantes dans le milieu scolaire. Leur amour du métier les a amenés à supporter l'horaire en continu, partagés en groupes mixtes (instituteurs, PEF et PES). Chaque groupe est tenu de fréquenter en rotation les trois ateliers : usage du multimédia, initiation à la réalisation d'un documentaire filmé et pédagogie du projet. Les travaux ont duré parfois jusqu'à des heures tardives de la nuit. Preuve s'il en est de l'engagement des uns et du talent des autres (les encadreurs). La dernière journée a été consacrée aux rapports de synthèse présentés en plénière et passés au moulin de la critique. Des rapports par atelier sous forme de travaux pratiques finalisés et qui ont servi d'épreuve d'évaluation. Une émouvante cérémonie a clôturé le stage. Très remarquée a été la présence – pas seulement protocolaire — de l'attaché culturel de l'ambassade de France. Féru de pédagogie et versé dans l'usage scolaire du multimédia, Gérard Claes n'a pas cessé de discuter métier avec les stagiaires et les encadreurs. Des cadeaux-souvenir achetés après collecte ont été offerts aux encadreurs par les enseignants. Un geste où s'expriment la reconnaissance et la satisfaction du devoir accompli. A coup sûr, ces connaissances engrangées via l'échange, l'écoute et le débat serviront à leurs élèves. Ces derniers ne sont-ils pas les destinataires premiers de toute action de formation initiée au profit des enseignants ? N'ont-ils pas le droit d'exiger de leurs éducateurs qu'ils soient outillés en conséquence pour mener à bien leur mission. Au droit des élèves, doit répondre en écho le devoir citoyen des enseignants. Quand ce devoir n'est pas respecté, c'est la relation éducative qui prend un coup. A l'instar de l'éducation permanente, la formation continue est un principe-clé dans toute politique de promotion de la ressource humaine. Les pays développés n'ont connu d'essor et de progrès que du fait de la matérialisation de ces deux concepts. Le droit de se former n'est pas antinomique de l'obligation morale de le concrétiser vaille que vaille. Même au prix de gros sacrifices. C'est là, la belle leçon de citoyenneté que donnent au quotidien ces enseignants de langue française. Une première en Algérie ! Aux collègues des autres disciplines d'emboîter le pas à ces pionniers de la formation à la carte.