« Ces deux journaux seront fermés au plus tard dans six mois», la sentence vient d'un haut responsable a la présidence lors d'un dîner en avril 2014, dans les salons feutrés algérois , hommes d'affaires, ministres, hauts responsables et voire même certains patrons de presse sont au courant « El Watan et El Khabar ne dureraient pas longtemps». Certains patrons de presse s'associent à cette campagne et ne ratent pas l'occasion pour descendre en flamme les deux journaux et inciteraient voire même appuyer cette sentence, un vrai travail de lobbying est engagé dans les coulisses, l'allégeance est payé rubis sur ongle à coup de publicité de l'Anep. Cependant, la décision ne fait pas l'unanimité au sein du sérail « rien n'explique ou justifie une telle décision, certes ce sont deux journaux au ton très critique néanmoins, ils n'ont jamais sombré dans l'invective ou l'insulte et leur crédibilité dépasse les frontières, nous avons besoin de journaux solides et responsables» admet un responsable au gouvernement. Au lendemain du 17 avril et à la veille de la formation d'un nouveau gouvernement, les tractations vont bon train, si les ministres régaliens sont maintenus à leur poste en récompense à leur loyauté affichée durant les élections, d'autres feront leur entrée au gouvernement, cette fois ci la garde rapprochée de Said bouteflika s'accaparent les portes feuilles ministériels chargés de l'économie, à leur tête Bouchouareb, nommé ministre de l'industrie et des mines. Les missions ainsi que les feuilles de route tracées, le travail de sape peut commencer, tous les moyens sont bons. Le concours de tous les ministres est exigé. Mot d'ordre, asphyxie financière. Le choix du ministre de la communication devient alors un enjeu de pouvoir. C'est ainsi que sort le nom de Hamid Grine « sa connaissance parfaite des acteurs du secteur, des journalistes, et du marché de la publicité font de lui le parfait ministre du secteur» explique une source à la présidence. L'actuel ministre de la communication aurait à maintes fois discuter sa feuille de route et accepter les termes de celle ci et se porterait volontier a en croire nos sources a l'exécuter. Fraîchement installé à la tête du ministère, le ministre convoque tour à tour les directeurs de publications des grands journaux, dans les coulisses le ministre avance à ses connaissances tout le contraire « il (le ministre) m'a dit que les responsables d'El Watan et d'El Khabar , ont été les premiers à me solliciter pour une entrevue , chose que j'ai accepté , ils n'auront aucun traitement de favoris « confie un responsable sécuritaire . Dans les coulisses, le ministre se livrerait alors à un exercice pour le moins surprenant de dénigrement auprès de ses interlocuteurs et ne raterait aucune occasion pour mettre en garde les publicitaires quant à leur relation avec les deux journaux ciblés. Parallèlement, à cette entreprise machiavélique , le ministre sous prétexte de redevance d'impayés auprès des imprimeries, asphyxie les titres à faibles revenus financières qui ont affiché publiquement leur opposition à un quatrième mandat de Bouteflika c'est ainsi que Hmida Ayachi met les clés sous le paillasson et ferme ses deux journaux , sa collègue de Al Fadjr , Hadda Hazem se voit contrainte de s'endetter pour payer les salaires de ses journalistes. Média planning juin 2014, face à ses écrans accrochés au mur de son bureau, le ministre de la communication s'attelle a son travail favori, le média planning. Il exigerait ainsi à toute les grandes agences de communication aux porte feuilles clients conséquent « de transmettre leur média planning avant la diffusion» révèle le manager d'une boîte de com. Le ministre crayon à la main, barre les insertions prévues pour certains journaux et les distribue aux médias «amis». Une ingérence que certains publicitaires ne supportaient plus les a poussé à informer leur client et demander quelle posture affichée devant un tel comportement « certains de nos clients nous disaient laisser faire pour cette campagne, voulez vous nous attirer les foudres du gouvernement, faites ce qu'il demande et négociez rien» atteste notre manager. Ainsi pour indiquer clairement aux récalcitrants le sérieux de l'entreprise, le ministre lors d'une déclaration à la presse menace à peine voilé les annonceurs « la ligne de conduite de l'entreprise, autrement dit l'entreprise qui, par le fait qu'elle choisit d'insérer ses annonces dans tel ou tel journal, signifie qu'elle opère un choix stratégique d'association d'images» a-t-il déclaré. En décodé, le ministre interdit aux annonceurs de passer leur publicité dans journaux critiques de l'action gouvernementale ou hostile au système. Résultat : des campagnes publicitaires détournées au profit des médias proches du pouvoir et dont les annonceurs se plaignent de l'efficacité d'un tel choix « les retombés ainsi que les objectifs de ces campagnes n'ont pas été profitables à nos clients , car les journaux à gros tirages et aux lecteurs qui correspondent aux profils cibles ou dit type ont été privés de ces annonces , donc pour nous ces campagnes ressemblent à des échecs commerciales» avoue un chef de pub , d'une importante agence de communication. Bouchouareb au secours de Grine Les menaces proférées par le ministre de la communication n'en dissuadent pas grand monde et voilà que le ministre de l'industrie Abdeslam Bouchouareb s'en mettrait de la partie et prendrait son téléphone pour menacer clairement les plus téméraires « ma surprise fut grande lorsque le ministre m'avait appelé au téléphone , j'avais cru qu'il s'agirait d'une proposition ou d'une invitation à un événement , ce fut le contraire , pendant la durée la conversation , il n'arrêtait de me mettre en garde contre mon comportement et ma décision de continuer mes insertions dans El Watan» révèle le patron d'une grande entreprise . Le ministre de l'industrie un des proche de Said Bouteflika , ne raterait pas une seule occasion pour « mettre en garde certains directeurs soucieux de préserver les intérêts de leur entreprise , j'ai vu certain tenter de le convaincre , peine perdue , le ministre ne veut rien entendre» confie le patron d'une boîte étrangère. C'est ainsi que les services du fisc sont actionnés et des entreprises reçoivent la visite des contrôleurs des impôts à la recherche de la moindre faille , cette fois ci les managers ont bien saisi le message a les en croire. Pour le directeur d'une entreprise étrangère « dans ce cas de figure vous n'avez le choix qu'entre deux options , ou bien continuer la campagne et perdre des parts de marché sinon suspendre votre communication et perdre plus en attendant que le climat s'apaise . Certes nous nous sommes pas ici pour faire de la politique, loin s'en faut, seulement voilà , lorsque vous vous retrouvez otage d'une politique, les affaires deviennent compliquées , et vos patrons à l'étranger vous demandent des comptes, parfois il est difficile de les convaincre d'un tel argument , vous êtes accusé à votre tour de masquer vos résultats par des explications outre que commerciales» se plaint-il. Face à de tels échecs et ingérences , certains annonceurs se plaignent aux membres du gouvernement , peine perdu , ils se tournent alors à leur quartier général installé à l'étranger . « pour s'enquérir de la situation mes patrons à l'étranger m'ont envoyé des émissaires afin de tenter de comprendre ce qui se passe, j'ai exposé en détail la situation , des détails que je n'ai pas pu contenir dans mes rapports envoyés par courriel , ils ont bien pris note , à leur tour , ils feront des rapports à notre management stratégique» confie de son côté le manager d'une boîte étrangère. A l'étranger ces affaires sont prises au sérieux et certains patrons n'hésitent pas à alerter leur gouvernements respectifs afin d'intervenir auprès des autorités algériennes « j'ai été destinataire d'une correspondance de la part de la direction générale me recommandant de continuer les campagnes promotionnelles et les insertions publicitaires dans les supports appropriés en fonction des tirages et de la crédibilité des médias, dans l'intérêt de la préservation de nos parts de marchés et en ciblant uniquement nos profils cibles « révèle le PDG d'une entreprise européenne. En d'autres termes, les médias privilégiés sont ceux s'adressant à la classe moyenne et l'élite « selon nos analyses, les campagnes diffusées dans les médias populaires ne nous ont pas apportés les résultats escomptés, par contre le retour a été plus que bénéfiques lors des campagnes promotionnelles ciblées et orientées vers nos profils clients recherchés» . Les critères donc sont clairs pour certains annonceurs « le succès dépend du support d'affichage ou de diffusion , le choix des titres et des médias n'est pas fortuit , il répond à des impératifs scientifiques connus et reconnus par les publicitaires du monde entier , pour atteindre nos objectifs marketing fallait l'appui et le quitus de nos responsables à l'étranger « justifie-t-il . Communication institutionnelle Pour d'autres entreprises de services, d'ingenering ou de conseil, la publicité institutionnelle est plus que vitale pour l'intérêt et la visibilité de ces boîtes. le choix est vite fait « si vous avez à choisir d'associer votre image au Washington post , a Der Spiegel , a The Guardian ou El mondo, le monde et El Watan en Algérie, ou bien à d'autres titres moins prestigieux et moins crédibles je peux vous assurer que le choix est vite fait , cela obéit à notre capital image et notre souci d'être présent dans les médias les plus influents du monde « l'argument est simple , notre manager l'explique « rien ne nous empêcherait de continuer nos campagnes institutionnelles , il s'agit de l'image de marque de l'entreprise et l'essence même et de notre stratégie marketing et communication, ne nous vendons pas de produits mais plutôt des services à forte valeur ajoutée , de l'expertise et un savoir faire , notre présence donc auprès de nos clients institutionnels les rassure mais cela nous attire aussi de nouveaux investisseurs potentiels à la recherche de notre accompagnement , pour cela nous allons les chercher la ou ils sont , et les médias influents dans ce cas la ne peuvent qu'être nos partenaires pour ne pas dire nos alliés» atteste-t-il. Faire pression sur ces annonceurs institutionnels demeure une tache hardie voire impossible à moins que selon nos interlocuteurs « la diplomatie ne se mette à contribution , chose qui demeure difficile notamment dans le cas des multinationales» . Malgré cela , des tentatives ont eu lieu « un ministre actuel a lors d'un voyage à l'étranger , a rencontré le président d'un groupe important, lors des discussions , le ministre en question n'a pas hésité à évoquer le sujet de la publicité et a tenté de convaincre le président de bien fondé de son plaidoirie» nous révèle un diplomate européen. Publicité publique Dans cette imbroglio , certains patrons d'entreprises publiques plaident pour la levée du boucliers contre l'interdiction qui leur est faite concernant l'insertion de publicité dans certains journaux. Si pour les tenants du régime la publicité publique sert a récompenser les «dociles « et punir les plus «hostiles» , pour les responsables des groupes privés « cela ne travaille pas les intérêts de nos entreprises , lorsque vous privez des ponts entiers de la société , surtout ceux qui en ont un pouvoir d'achat assez conséquent de l'accès à l'information , cela se répercute sur nos parts de marché au profit des entreprises privées concurrente, c'est pour cela je n'ai jamais cessé de plaider pour casser ce verrou et penser au bien de l'entreprise publique algérienne et consolider ses acquis , cela devient un impératif dans un climat de plus en plus concurrentiel» explique le responsable d'une banque publique algérienne . Les dommages ne s'arrêtent pas là, puisque le développement locale à son tour subis les dommages collatérales de cette politique « chaque jour nous lisons des annonces d'infructuosité dans la presse nationale, combien de temps a-t-on perdu, combien de chantiers sont à l'arrêt ? La raison est simple, le choix des supports était inapproprié voire nul . Les autorités sont conscientes de ces dommages mais ne font rien pour y remédier. Faut corriger le tir et mettre de côté les calculs politiciens et penser au bien du pays « lâche un haut responsable de l'Etat . « les rapports établis que ce soit par les services de la présidence ou ceux du gouvernement et autres services de l'Etat , attestent de la solidité , du respect des lois , et de la bonne gestion de ces journaux incriminés à tort , ceux qui en ont profitent sont ceux à blâmer , les rapports en notre possession révèlent de grave anomalies , notamment financières , il est temps de mettre de l'ordre» assène t-il.