Le voyage-éclair de François Hollande à Alger a été largement commenté par la presse française avant et après la visite. Signe d'une relation «exceptionnelle» qui se met en mouvement. Celui qui résume le mieux cet état d'esprit du côté français est Jack Lang, président de l'Institut du Monde arabe (IMA) qui a déclaré au journal Le Monde : «Je n'ai jamais connu une telle lune de miel entre la France et l'Algérie.» Mais le ton médiatique n'était pas en accord avec la voix officielle. Des éditorialistes n'ont pas manqué de relever le contexte politique interne dans lequel est intervenue la visite de Hollande. «En atterrissant à Alger, François Hollande se posera sur un volcan qui risque d'entrer bien tôt en activité», a analysé le directeur de Libération, Laurent Joffrin, dans un éditorial. Le Journal a consacré tout un dossier sur la visite de Hollande sous le titre «La grenade algérienne». Les questions économiques qui «connaissent un progrès significatif» et la «lutte commune» contre le terrorisme ont dominé les discussions entre Bouteflika et Hollande. Cependant, «cette visite de Hollande fait grincer des dents à Alger», commente Le Point en rapportant les «réserves» exprimées par une partie de l'opposition. L'Obs (anciennement Nouvel observateur) est encore plus critique. «Hollande en Algérie : visite de courtoisie dans un régime en pilote automatique» titre l'hebdomadaire de Jean Daniel. «Qui dirige vraiment l'Algérie ? Le président algérien Abdelaziz Bouteflika, affaibli par un AVC, entend mener son 4e mandat jusqu'à son terme, en 2019. Comment ?», s'interroge Sarah Diffalah. Au-delà des impératifs de la coopération sécuritaire entre Alger et Paris et «les motifs économiques», le Figaro a par ailleurs évoqué «des ombres et des blocages subsistent dans le lien franco-algérien». «L'embellie de la relation économique ne s'est pas traduite par des achats d'équipements militaires français, les Algériens préférant se fournir en Russie. La coopération militaire a aussi des limites sur le terrain», écrit le journal. Le quotidien de droite, comme la majorité de la presse hexagonale, n'a pas passé sous silence le contexte politique national. «Alors que la bataille pour la succession a commencé en coulisses à Alger, de nombreux spécialistes estiment que l'intimité des liens créés entre les deux pays pour lutter contre le terrorisme conforte un régime usé et autoritaire.» Le Parisien, lui, parle d'un Hollande qui «vante la grande maîtrise intellectuelle» de Bouteflika. De son côté, La Croix parle de «la signature de contrats – certains évoquent même à terme des ventes d'armes – qui profiteraient à François Hollande, qui semble bien être déjà entré en précampagne en vue d'un deuxième mandat» sous les auspices d'une «visite lourde d'enjeux pour François Hollande à Alger». Le plus grand quotidien régional de France, Ouest France, dans son éditorial, assure qu'Alger est «le partenaire crucial pour Paris». Il qualifie la visite de Hollande d'«exercice délicat car une guerre sourde de succession est en cours dans les couloirs du pouvoir algérien. Il y a trois ans, le soutien implicite au régime algérien aurait été en dissonance avec l'air du temps. Le Printemps arabe étant fini, retour à la realpolitik. Le sécuritaire prime de nouveau. Au Caire comme à Alger. A Paris aussi». Enfin, le quotidien du soir, Le Monde, insiste sur un déplacement qui «devait être placé sous les auspices du business, il aura été presque entièrement dominé par la question du terrorisme». Le quotidien n'a pas manqué de répliquer à la déclaration de Hollande qui a rassuré sur la bonne santé «intellectuelle» de son homologue algérien. «Les quelques images prises en début d'entrevue montraient cependant un homme diminué, qui a besoin d'un amplificateur de voix pour se faire entendre de ses interlocuteurs. Et c'est seul que le président Hollande a fait la conférence de presse…»