Une cinquantaine de chefs d'Etat et de gouvernement, 3000 délégués et 140 pays représentés : le 14e sommet du Mouvement des Non-alignés (MNA) cherchera à La Havane un nouveau souffle dans l'hostilité aux Etats-Unis, auprès d'un Fidel Castro convalescent mais décidé à asseoir le leadership cubain sur le mouvement. Venus d'Asie, d'Afrique et d'Amérique latine, les héritiers de la conférence de Bandung de 1955 vont une nouvelle fois « plancher » sur les thèmes traditionnels du mouvement – pauvreté, développement et injustice – tout en recherchant une difficile unité sur les questions brûlantes du jour : programme nucléaire iranien et situation au Moyen-Orient notamment. Le sommet se déroulera dans une situation inédite à Cuba depuis l'avènement au pouvoir en 1959 de Fidel Castro : convalescent depuis son opération chirurgicale annoncée le 31 juillet, le chef de l'Etat a passé provisoirement les rênes à son frère Raul, numéro deux du régime. Le secrétaire général de l'ONU, Kofi Annan, hôte traditionnel du sommet, viendra s'exprimer vendredi devant les chefs d'Etat et de gouvernement, qui devraient commencer à arriver jeudi, précédés de leurs ministres des Affaires étrangères et des hauts fonctionnaires, qui entameront leurs travaux dès aujourd'hui. Après l'étape de La Havane, nombre de dignitaires enchaîneront sur New York pour l'Assemblée générale annuelle de l'ONU. D'Asie sont notamment attendus les présidents Mahmoud Ahmadinejad d'Iran, Bachar Al Assad de Syrie, Pervez Musharraf du Pakistan, ainsi que le Premier ministre indien Manmohan Singh. D'Amérique latine, les deux ténors du courant « néo-castriste », Hugo Chavez pour le Venezuela et Evo Morales pour la Bolivie, fourniront un appui sans faille à la diplomatie cubaine, soucieuse de « revitaliser » leMNA. Majoritaires parmi les 116 pays membres, les Africains seront représentés notamment par Abdelaziz Bouteflika pour l'Algérie et Thabo Mbeki pour l'Afrique du Sud, tous deux proches de Fidel Castro. Parmi les 24 pays observateurs, les Etats-Unis ont décidé cette fois d'ignorer une rencontre qu'ils savent d'avance dirigée contre eux. Selon le projet de déclaration finale, le sommet devrait ainsi dénoncer « l'unipolarisme et les visées de domination hégémonique dans les relations internationales », de même que « les modèles néolibéraux imposés dans le cadre de la mondialisation en cours ». Assuré du soutien cubain, l'Iran, de son côté, « va faire le forcing » pour faire avaliser sa thèse sur le caractère pacifique de son programme nucléaire et courtise déjà à cette fin plusieurs pays africains avant le passage du dossier au Conseil de sécurité, a-t-on indiqué de source diplomatique africaine. Le Venezuela d'Hugo Chavez recherchera des soutiens pour tenter d'arracher une place de membre non permanent au Conseil de sécurité de l'ONU, tandis que Haïti doit faire son entrée au MNA avec l'île caraïbe de Saint Kitts et Nevis, portant à 118 les pays membres. Cuba, qui prendra à cette occasion la tête du MNA pour trois ans – Fidel Castro l'avait déjà présidé de 1979 à 1992 après son 6e sommet de La Havane –, compte pour sa part proposer aux Non-alignés un programme d'actions concrètes dans les domaines de la santé, de l'éducation et de l'énergie. Né de la conférence afro-asiatique de 1955 à Bandung, en Indonésie, le MNA avait été fondé à Belgrade en 1961, sous les auspices du maréchal Tito, de l'Indien Nehru et du président égyptien Nasser, afin d'ouvrir une « troisième voie » entre les deux blocs de la guerre froide. Fidel Castro est le dernier survivant de cette génération. Fidel Castro va présider le dîner d'accueil Fidel Castro, qui a « temporairement » délégué fin juillet la direction de Cuba à son frère cadet et ministre de la Défense, Raul, après une intervention chirurgicale, présidera vendredi le dîner offert en l'honneur des dirigeants des pays non-alignés, selon le programme officiel cubain publié hier à La Havane. Le Lider maximo, 80 ans, avait annoncé dans un communiqué publié le 5 septembre qu'il a perdu près de 20 kilos en l'espace d'un peu plus d'un mois, mais que « le moment le plus critique est désormais passé » après l'intervention chirurgicale qu'il a subie pour des saignement intestinaux. « Aujourd'hui, je me remets à un rythme satisfaisant », soulignait cette déclaration publiée par le quotidien du Parti communiste Granma et accompagnée de nouvelles photos du Lider maximo. « Dans les jours qui viennent, je recevrai des hôtes distingués », ajoutait le leader cubain apparemment en allusion aux chefs d'Etat et de gouvernement attendus la semaine prochaine à La Havane pour le sommet des pays non-alignés, qui réunit 116 pays en développement d'Afrique, d'Asie et d'Amérique latine. Les temps forts du sommet, qui débute aujourd'hui, auront lieu vendredi et samedi avec les rencontres des chefs d'Etat et de gouvernement. Le programme officiel diffusé hier ne précise pas si Fidel Castro y participera, ne mentionnant que le dîner d'accueil prévu vendredi à 20h30. Fidel Castro a annoncé le 31 juillet par une lettre lue à la télévision d'Etat qu'il venait d'être opéré pour des saignements intestinaux et avait « temporairement » confié le pouvoir à son frère cadet, âgé de 75 ans. Les autorités cubaines ont démenti qu'il souffrait d'un cancer, mais n'ont livré que peu d'informations sur l'origine de sa maladie.