Soucieux d'associer les jeunes à ce débat, Nabni a invité trois «acteurs de la société civile» à échanger avec les conférenciers. Parmi eux, Talel Sellam qui anime une web-radio : Deejayz Radio (www.ladeejayz.com). M. Talel annonce d'entrée, avec un zeste de provoc', qu'il allait faire son «Eric Zemmour» pour titiller un peu ce beau panel. A ceux qui doutent du patriotisme des jeunes, de leur attachement à leur identité, il rétorque : «Faux ! Elle existe mais sur un support de communication différent. Je vous donne un exemple. Un tweet posté par un type qui s'appelle Mossaâb El Harbi disait que l'Etat islamique se préparait à envahir l'Algérie. Et là, il y a eu un tollé de réactions de la part des Algériens. Donc l'identité nationale est là. Les jeunes sont prêts à défendre leur pays. Les jeunes sont prêts à travailler. Encore mieux : les jeunes ont leur histoire. C'est juste qu'elle est un petit peu différente de celle d'avant. Aujourd'hui, les jeunes prennent l'événement d'Oum Durman comme référence historique. Même si c'est planifié par le système, qu'on le veuille ou non, ça reste quelque chose dont tous les Algériens sont fiers. C'est le plus grand pont aérien. Tout le monde en a vibré. Je pense que l'histoire, on la fabrique tous les jours, avec des événements du quotidien.» Pour abonder dans le sens de notre ami, il convient de citer toutes ces petites phrases devenues cultes, et qui sont désormais gravées dans la mémoire collective : «Hagrouna sadiki», «Les hommes !» (prononcer, de préférence, «Li Zommes») ou encore «win rahi la sécurité yat…». De véritables «private joke» collectifs… En réaction aux propos de «Talel Zemmour» comme il le taquinait, M. Hadj-Nacer a dit : «Bien sûr qu'Oum Durman, c'est intéressant. C'est sympathique. Même moi, j'ai vibré avec Oum Durman. Même moi, je suis sorti dans la rue. Mais entre l'épopée et la construction d'un mythe national, il y a beaucoup de travail.» M. Hadj-Nacer confie plus loin qu'il avait dû interrompre une mission à Malte en cet historique 18 novembre 2009 pour ne rien rater de l'événement. «J'ai remué la terre pour rentrer en Algérie», sourit-il avant de tempérer les ardeurs de Talel : «Mais Oum Durman nous a endormis. Grâce à Oum Durman, le régime a gagné des années.» Et de faire remarquer : «Cela nous a démontré qu'on était capables de mobilisation. Mais cela, on le sait depuis des millénaires. On a quand même fait la guerre à une puissance de l'OTAN !» Nacer Djabi recoupera cela avec la notion de «moment générationnel», situation paroxystique sublimée par une génération à un temps T. «Le moment générationnel de l'ancienne génération, c'est la Révolution du 1er Novembre. Le moment générationnel des plus jeunes, c'est Octobre 88, c'est Oum Durman», analyse-t-il en mettant en garde contre la tentation, pour une génération, d'imposer son récit et de s'arroger le monopole de l'histoire.