35 millions d'euros, c'est le montant que la compagnie aérienne française Aigle Azur n'arrive pas à rapatrier depuis plus de dix ans vers la France. Le problème ne date pas de cette année uniquement. Le montant en question est cumulé depuis plus de dix ans. Selon des sources officielles auprès du gouvernement algérien, «Manuel Valls a interpellé les autorités algériennes à deux reprises lors de ses deux derniers déplacements» afin de débloquer les fonds de la société. Mais les autorités algériennes n'ont apparemment pas pris la chose au sérieux, car une autre source assure que «des contrôleurs de la Banque d'Algérie se trouvent depuis plus de deux ans dans les bureaux de la compagnie à Alger pour passer au peigne fin la comptabilité de la compagnie». Cette compagnie, qui en l'espace de quelques années est devenue le concurrent No 1 d'Air Algérie et d'Air France sur les vols Algérie-France. Selon le manuel de la réglementation internationale, «ces transporteurs accumulent ainsi des recettes dans de nombreuses monnaies, dont certaines font l'objet de contrôles des changes. La conversion et le transfert des monnaies — des fonds en monnaie locale restant après que les dépenses locales ont été soustraites des recettes locales étant changées en une devise convertible que le transporteur aérien pourra transférer à son siège ou ailleurs», cela veut dire : au bout d'une année d'activité, la compagnie paie toutes ses charges dans le pays étranger et peut transférer le reste vers le pays d'origine. Chantage Un ancien cadre de la compagnie parle d'un chantage de la part des responsables du gouvernement, car, quand Arezki Idjerouidene possédait Antinea Airlines « il s'est rapproché de la direction de l'aviation civile pour lui donner une autorisation afin de pouvoir desservir la France, mais certains cadres ont refusé et lui ont exigé une part des bénéfices. Le propriétaire d'Antinea Airlines vend sa compagnie pour Khalifa Airways afin que cette dernière ait le contrôle sur tout le marché algérien et écarter tous les concurrents. Par la suite, Arezki Idjerouidène achète en France la compagnie Aigle Azur et se rapproche de la direction de l'aviation civile algérienne qui lui a délivré des autorisations pour des vols France-Algérie. Les responsables de ces services n'avaient pas d'autre choix, car s'ils refusaient la direction de l'aviation civile française risquait de retirer les autorisations pour Air Algérie qui réalise la majorité de son chiffre d'affaires sur la destination française. C'est pour ces raisons que les responsables du régime algérien sont acharnés contre ce patron d'origine algérienne.» Selon la presse française, le gouvernement algérien a été sollicité une autre fois par François Hollande lors de sa dernière visite afin de débloquer la situation. Pour rappel, la compagnie Air France a aussi été victime de la même pratique, mais en 2014 la Banque d'Algérie avait autorisé la compagnie de transférer 50% de ses recettes, soit 8 millions d'euros. Des sources sûres nous apprennent que la Banque d'Algérie a autorisé mercredi dernier la compagnie Aigle Azur à transférer 8 millions d'euros, une somme égale en montant à celle autorisée pour Air France, soit 22,8% de ses recettes bloquées. Par contre, la compagnie nationale Air Algérie rapatrie normalement depuis la France ses fonds actuellement. Une source fiable du gouvernement français assure que si les autorités algériennes ne débloquent pas les fonds d'Aigle Azur, la France risque d'appliquer une politique de réciprocité en bloquant les recettes d'Air Algérie en France. «La stratégie est simple : soit on débloque tout, soit on bloque tout, mais avant cela on va essayer de régler le conflit diplomatiquement», assure notre source. Nous avons essayé de joindre les responsables de la Banque d'Algérie, mais nous n'avons pas eu de réponse. Les responsables de la compagnie en question refusent aussi de communiquer sur la question.