Des inconnus ont fait exploser, hier matin, trois jours après l'Aïd El Fitr, 5 véhicules appartenant à des éléments des brigades Ezzedine El Qassam, la branche armée du Hamas et des Sarayas El Qods, la branche armée du Djihad islamique, garés près de chez eux, dans le quartier Cheikh Redouane, à l'ouest de la ville de Ghaza. Selon des habitants de ce quartier, considéré comme l'un des bastions du Hamas, les charges déposées sous les véhicules visés ont explosé en même temps, ce qui veut dire que plusieurs individus ont participé à l'opération. Celle-ci était de toute évidence coordonnée. A part les explosions qui ont été impressionnantes et ont rappelé aux citoyens du quartier, pour un de temps, l'atmosphère de la guerre israélienne contre Ghaza de l'été dernier, ces attentats n'ont pas causé beaucoup de dégâts. Quelques maisons proches des véhicules visés ont été légèrement endommagées. Certains médias locaux ont indiqué que les débris de vitres brisées par le souffle des explosions ont légèrement blessé deux habitants du quartier. Les services de sécurité du mouvement Hamas, qui contrôle en solo la bande de Ghaza depuis l'été 2007, sont très vite arrivés en force dans le quartier. Mais les auteurs des attentats avaient déjà quitté les lieux. Ils ont toutefois laissé derrière eux des inscriptions sur un mur, à proximité d'un des véhicules détruits, indiquant leur appartenance à Ançar Al Charia, un groupe de la mouvance salafiste djihadiste, et un dessin incomplet du drapeau du groupe terroriste autoproclamé Etat islamique (Daech). Le porte-parole des services de sécurité du Hamas, Iyad El Bozom, a affirmé que «les criminels n'échapperont pas, les services de sécurité feront tout pour les arrêter». Même s'il n' y a pas eu de revendication officielle de ces attentats, l'empreinte de la mouvance salafiste djihadiste est sensible. Cette mouvance est en désaccord avec le mouvement Hamas pour «sa non-application de la charia dans sa gouvernance». Frères musulmans contre salafistes Le mouvement Hamas avait éliminé un élément influent de ces islamistes radicaux au début du mois de juin passé, dans ce même quartier de Cheikh Redouane. A signaler par ailleurs que c'est la première fois que des éléments du Djihad islamique, le deuxième plus grand mouvement islamiste en Palestine, sont visés. Les incidents les plus graves ayant opposé le mouvement Hamas aux salafistes djihadistes remontent à l'été 2009, lorsque Abdelatif Moussa, un des leaders de cette mouvance, a proclamé la ville de Rafah, au sud de l'enclave palestinienne, émirat islamique. La suite a été sanglante. Des forces du Hamas ont attaqué la mosquée où il s'était retranché et son domicile à Rafah. En plus de l'individu qui s'était proclamé émir, des dizaines de salafistes armés avaient été tués dans les accrochages. Une vidéo récente tournée en Syrie montre trois Palestiniens de Ghaza ayant rejoint l'Etat islamique, menaçant le mouvement Hamas d'une guerre sans merci. Un dirigeant du Hamas a récemment déclaré à la presse que son mouvement «ne veut pas que Ghaza devienne la Syrie ou l'Irak, car ce serait faire un cadeau à l'occupant israélien». Les mouvements Hamas et Djihad islamique ont dénoncé à plusieurs reprises les agissements des groupes djihadistes, notamment ceux de l'Etat islamique. Catalogué comme mouvement terroriste par l'Egypte et la communauté internationale, le Hamas semble aujourd'hui le seul rempart contre le salafisme et le terrorisme dans l'enclave palestinienne. Le mouvement Hamas, en déclarant la guerre à l'EI et au Front Nosra, réussira-t-il à regagner sa légitimité auprès de l'Egypte et de la communauté internationale ?