Une conférence internationale sur «L'extrémisme violent et la déradicalisation» s'ouvrira demain, à l'hôtel Sheraton, et s'étalera jusqu'à jeudi. C'est ce qu'a annoncé hier le ministère des Affaires étrangères au cours d'un point de presse animé par Abdelkader Messahel, ministre des Affaires maghrébines et africaine s et de la Coopération internationale. Le ministre était accompagné de Abdelaziz Benali Cherif, directeur de la communication du MAE, et d'El Haouès Riache, ambassadeur conseiller en charge du dossier de l'antiterrorisme. M. Riache a indiqué que des experts et des hauts fonctionnaires issus de plusieurs pays prendront part à cet important rendez-vous. La conférence accueillera notamment l'ensemble des pays membres du Global Counterterrorism Forum (GCTF). Le Forum mondial de lutte contre le terrorisme, dont l'Algérie est l'un des fondateurs, a été créé en septembre 2011 à New York. Il compte une trentaine de pays. Sont attendus également à cette conférence les représentants des 15 membres du Conseil de sécurité de l'ONU. A retenir aussi les délégations des pays du Sahel, de l'Union africaine, de l'Union européenne, de l'Organisation de la conférence islamique ainsi que des émissaires de différentes organisations internationales et régionales. «Une dizaine de pays, qui n'étaient pas invités, ont également demandé à participer à cette conférence», souligne M. Riache, avant de lancer, confiant : «Nous allons avoir une excellente participation. Nous ferons le plein.» L'ancien ambassadeur d'Algérie en Suisse a, ensuite, détaillé l'ordre du jour de cette conférence, soulignant que huit thématiques y seront disséquées en ateliers. Celles-ci porteront essentiellement sur le rôle du système judiciaire et le travail de déradicalisation en milieu carcéral ; le rôle des instances religieuses en termes de prévention et de désendoctrinement ; l'action de la société civile ; la question de la réhabilitation et de la réintégration, le rôle de l'éducation et de l'école ; l'impact des médias et des programmes religieux, et enfin, une séance spéciale sera dédiée au phénomène de l'islamophobie. Les travaux de la conférence seront sanctionnés par un «relevé des conclusions établi par le pays hôte». «Il n'y aura ni déclaration ni communiqué», a tenu à préciser M. Riache. Les recommandations des experts seront ensuite présentées lors d'un «sommet sur l'extrémisme violent» qui se tiendra en septembre prochain à New York, sous l'égide des Nations unies. Selon M. Messahel, d'autres réunions se tiendront dans d'autres capitales en prévision de ce sommet onusien. Il convient de souligner que cette conférence d'Alger fait suite au Sommet de Washington contre l'extrémisme violent organisé par la Maison-Blanche du 17 au 19 février dernier durant lequel, souligne M. Messahel, l'expérience de l'Algérie en matière de déradicalisation a suscité un vif intérêt. «L'Algérie a été choisie à la demande de beaucoup de partenaires pour partager son expérience. La demande nous a été formellement faite par les Nations unies qui s'intéressent à ce que l'Algérie a fait depuis des années en matière de déradicalisation». Une pensée émue aux martyrs de Aïn Defla Comme on peut l'imaginer et vu le menu de cette conférence, l'attaque terroriste qui a été perpétrée en plein Aïd El Fitr dans la wilaya de Aïn Defla, qui a coûté officiellement la vie à neuf de nos valeureux soldats selon le MDN, était dans tous les esprits. «Le drame survenu à Aïn Defla – nous sommes tous Algériens – nous a touchés au plus profond de nous-mêmes. Sur le plan international, nous n'avons cessé de dire que la menace terroriste existe toujours. La mobilisation de tous les Algériens pour continuer à faire face à ce phénomène est plus que requise», réagit Abdelaziz Benali Cherif. Il a tenu à rappeler que «l'Algérie est connue et reconnue comme étant un pays qui a fait face seul au terrorisme». Interrogé sur les raisons de la persistance des actes terroristes alors même que l'Algérie est citée en «exemple de déradicalisation», M. Messahel s'est évertué à en atténuer la portée en martelant que «l'Algérie a vaincu le terrorisme». «Tout ce qu'a fait l'Algérie dans la lutte antiterroriste, el hamdoullah, a porté ses fruits. Nous avons vaincu et il y a des faits qui le prouvent. La situation (sécuritaire) s'est nettement améliorée (…). Cependant, la vigilance est toujours de mise», argue-t-il. Le «Monsieur Afrique» du MAE fait le distinguo entre «la lutte, le traitement et la prévention». Et le travail de déradicalisation s'inscrit précisément dans ce sens : «La lutte antiterroriste par des moyens militaires, sécuritaires, ne suffit pas», insiste M. Messahel. Et de citer la politique de la concorde civile et de la réconciliation nationale au titre des bons ingrédients du modèle algérien, même si, force est de le constater, la «moussalaha» est loin de faire l'unanimité dans la société. «Après, il y a eu la révision de certains programmes scolaires. Il y a eu un travail sur les mosquées, sur la formation des imams, sur le rôle des médias. Et tout cela participe de la philosophie globale de la lutte contre l'extrémisme», énumère-t-il. Dans la foulée, Abdelkader Messahel évoque la «démocratisation» de la vie publique comme autre adjuvant salutaire. «Ce n'est pas une coquetterie», glisse-t-il mais «un facteur réel de déradicalisation». Et de faire remarquer : «Ce qui se passe en Irak, en Libye, au Mali, en Somalie ou ailleurs, c'est (le résultat de) l'absence d'un Etat. C'est là où le terrorisme s'enracine et se développe. Il se développe dans le chaos. Donc il y a deux éléments essentiels dans la politique de déradicalisation : c'est le facteur démocratie, la justice, les droits sociaux et économiques du citoyen. Mais en même temps, c'est un Etat capable.»