Pourquoi certains partis organisent des universités d'été ? Pourquoi d'autres ne recourent pas à cette pratique existant dans nombre de pays ? Si les formations politiques de l'opposition ne peuvent se passer de cette manifestation importante qui a pour but, entre autres, d'élargir la base militante, d'approfondir le débat et de réfléchir aux futurs projets, les formations politiques «petites ou grandes» préfèrent le travail de proximité et les réunions restreintes. Pourquoi ce choix ? Les raisons diffèrent d'un parti à un autre. Si pour certains, la raison principale est liée au manque de moyens matériels et financiers, pour d'autres la cause est tout autre. Au FLN, elle est liée à la crise et à l'instabilité qui secouent le vieux parti depuis plusieurs années. Au RND, la direction ne voit pas l'utilité d'aller vers une université d'été… Jil Jadid dirigé par Soufiane Djilali, le FNA présidé par Moussa Touati, le FDS de Noureddine Bahbouh disent, sans aucune ambiguïté, qu'ils ne peuvent pas organiser une université d'été car ils n'ont ni les moyens pour louer la salle de conférences ni pour héberger leurs invités. «Nous ne sommes pas riches pour organiser une université d'été et nous ne sommes pas les relais du pouvoir pour avoir une aide financière afin d'organiser cette manifestation. Nous sommes un parti marginalisé, qui n'a pas cette chance d'avoir des sponsors», déplore Moussa Touati, qui est persuadé que «ce sont les partis ayant de l'argent et bénéficiant de bons de commande de l'Etat et de subventions des entreprises publiques qui tiennent systématiquement des universités d'été». Le FNA a pu organiser, en 2002, sont unique université d'été ; depuis, il a opté pour des déplacements à la rencontre des militants et le travail de proximité. D'ailleurs, Moussa Touati estime que ses cadres et la direction du parti sont tout le temps en mouvement et actifs sur le terrain, d'où l'inutilité d'organiser une université d'été. Noureddine Bahbouh du FDS avance presque les mêmes arguments que Touati et a décidé en contrepartie de sillonner les villes du pays à la rencontre de la base militante pour la sensibiliser sur les questions d'actualité et les projets du parti. Pour occuper le terrain en dépit du manque de moyens, la formation de Soufiane Djliali a élaboré, l'année dernière, un plan de formation en cinq étapes et, chaque année, ses militants traitent d'un thème choisi par la direction. Autre formation politique qui ne tiendra pas son université d'été alors qu'elle en a les moyens matériels, logistiques et financiers, le RND. Pour le RND, C'est un show médiatique Pour Seddik Chihab, porte-parole de cette formation, la direction du parti a opté pour des rencontres régionales et des réunions de proximité. Le RND a tenu deux universités d'été en 2004 et 2005, des manifestations qui n'ont pas été à la hauteur des aspirations des dirigeants et n'ont pas apporté les résultats escomptés. «Nous avons constaté que ces universités d'été ne sont qu'un show médiatique. Une fois les caméras disparues, les militants rentrent chez eux. Les expériences de 2004 et 2005 ont été pour nous un échec. Nous n'avons donc pas voulu les rééditer», explique Seddik Chihab. Le parti dirigé par Ahmed Ouyahia a choisi une autre stratégie, plus fructueuse aux yeux de la direction, à savoir des rencontres régionales et des conférences-débats. Le FLN a d'autres priorités L'autre parti au pouvoir, le FLN, qui était pourtant leader en la matière, n'accorde pas, depuis l'arrivée de Amar Saadani à sa tête, un intérêt particulier à l'université d'été. Pour Bouhadja, porte-parole du parti, il est quasiment impossible de tenir une université d'été en ce moment. Le parti, qui vit des remous depuis quelques mois, doit d'abord convoquer le comité central qui devrait élire le bureau politique, instance habilitée à mettre sur pied un programme d'action. «Tant que le bureau politique n'est pas installé, le parti ne peut rien faire, il faut attendre le mois de septembre pour être fixé sur le calendrier du parti», note Bouhadja. Pour les partis de l'opposition, l'université d'été est un passage incontournable. Pour le PT, le RCD, le FFS, le MSP et Ennahda, elle marque la rentrée politique après la trêve estivale. Taazibt du Parti des travailleurs (PT) estime que chaque université d'été revêt un cachet particulier en relation avec l'actualité nationale et internationale. «Le PT organisera, les 21 et 22 août, son université d'été. Cette activité est devenue une tradition chez nous, dès lors que les militants et les cadres du parti ont toujours besoin d'échanger les informations. Ce n'est pas une université académique, elle est liée beaucoup plus à la pratique», explique Taazibt. Une tradition chez les partis de l'opposition Cette action permet, selon notre interlocuteur, d'homogénéiser la politique du parti. «Toutes les wilayas du pays participent à cet événement. C'est un cadre de réflexion pour débattre et discuter de toutes les questions de l'heure», ajoute-t-il. Le parti de Louisa Hanoune fait la différence entre travail de proximité et université d'été. «Pour un parti qui a une existence réelle, le travail de proximité se fait durant toute l'année, alors que l'université d'été est un regroupement de militants issus de toutes les régions du pays», explique Taazibt, précisant que le thème de cette université portera sur la résistance et le combat. De son côté, le RCD, parti rompu à ces pratiques politiques, est, d'après ses responsables, le premier à avoir introduit le concept d'université d'été. Cette année, son organisation de est confiée à la coordination des jeunes libres de ce parti, créée en mai dernier. Prévue à la rentrée prochaine, cette manifestation sera précédée par des conférences régionales. «Nous avons préféré responsabiliser les jeunes du parti en leur demandant de piloter cette université, le but est de les former à la vie politique et d'élargir la base militante pour mieux préparer la rentrée sociale. Qui mieux qu'un jeune pour comprendre les doléances de la jeunesse algérienne», explique Yassine Aissiouane, précisant que ces assises sont prévues pour le mois d'octobre. Le FFS, quant à lui, a programmé son université d'été pour les 2, 3 et 4 septembre à Béjaïa. Le plus vieux parti de l'opposition consacrera cette activité exclusivement aux étudiants et au rôle de l'université. «Nous allons discuter de la réalité de l'université algérienne, des problèmes auxquels elle est confrontée, au rôle de l'étudiant au sein du parti et dans l'université. En somme, toutes les question liées à ce volet seront traitées par les participants à cette université d'été», souligne M. Aouchiche. Le MSP, lui, ne rate jamais deux occasions : le séminaire sur le parcours du défunt Mahfoud Nahnah et l'université d'été. Cette année, celle-ci se tiendra du 24 au 28 août à Mostaganem et le thème choisi est le renouveau politique. Une thématique qui colle à l'actualité. «L'Algérie risque de connaître des moments difficiles. Nous devons approfondir nos idées et réfléchir à ces remous et incertitudes. Nous serons confrontés à des problèmes politiques. Ce sont toutes ces questions qui seront débattues lors de ces assises», a fait savoir Abderrezak Makri, leader du MSP.