Présidant l'ouverture de l'université d'été du Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD), qui s'est déroulée jeudi dernier à Zemmouri (Boumerdès), le docteur Saïd Sadi a plaidé pour la réconciliation de l'Etat avec la société, préconisant la régionalisation comme modèle institutionnel de gestion des collectivités. Le président du RCD a, en effet, dressé un diagnostic accablant sur le système de gouvernance adopté jusque-là. « Les fraudes électorales ont consacré l'illégitimité dans la représentation nationale et institutionnalisé la corruption », lance-t-il. Pour lui, il ne s'agit plus de « réformer », mais de « refonder » l'Etat si nous voulons éviter à notre pays d'être la Yougoslavie de l'Afrique du Nord. Le docteur Sadi fait, également, remarquer que les institutions algériennes portent les symptômes de la personnalisation du pouvoir, de l'absence du contrôle et de la concentration des prérogatives. « L'objectif du régime étant le contrôle et non le développement du pays, l'Algérie se retrouve avec des outils qui peinent à répondre à la demande citoyenne », dira-t-il, ajoutant que la culture de l'émeute s'enracine et la jacquerie s'impose comme moyen d'expression et de médiation sociales. Le conférencier indique que la nature du régime bride et neutralise toute possibilité d'essor national, citant comment la résistance face à l'islamo-terrorisme a été pervertie et la flambée du prix du pétrole est sans effet sur le vécu du citoyen. Poursuivant son réquisitoire, il s'est attaqué au fléau du régionalisme, qualifié de « pendule qui rythme les affrontements clientélistes » et qui constitue une constante dans la répartition du pouvoir. Puis, le docteur Sadi tire la sonnette d'alarme : « Notre pays est dans un moment de tensions et d'incertitudes jamais connues », et « ce qui aggrave le péril, c'est que le régime ne se sent concerné par un problème que lorsqu'il le menace directement et immédiatement ». Se tournant vers les démocrates, le docteur Sadi estime qu'« on ne peut plus continuer à revendiquer une identité de démocrate, aspirer à vivre dans une société de liberté et d'équité et tourner le dos au changement quand arrive le moment de l'engagement ou du choix ». Dans ce sillage, il a critiqué le « vote utile » qui est la caricature d'une schizophrénie politique, qui consiste à postuler à la démocratie et à travailler au renforcement d'un régime que l'on proclame vouloir combattre. Selon le docteur Sadi, « si le démocrate algérien veut peser sur la décision politique dans son pays, il doit d'abord assumer ses convictions ». Le remède que préconise le numéro un du RCD s'appelle la régionalisation, considérée, à la fois, comme « instrument de développement » et « antidote du régionalisme ». Pour l'orateur, le monde est à la transparence et à la délégation des pouvoirs pendant que le pays s'enfonce dans l'opacité et la confiscation des prérogatives. Exemple : un président d'APC, élu par la population, n'a pas le droit d'engager sa municipalité dans un projet de coopération avec son pair étranger alors que son secrétaire général, parce qu'il est nommé par l'administration, peut entreprendre toute initiative de jumelage. Le docteur Sadi considère que la démocratie de proximité est la seule option efficace et réaliste dans l'Algérie d'aujourd'hui, plaidant, ainsi, pour des parlements et des gouvernements régionaux. Dans cette optique, il juge les prochaines échéances électorales de « décisives » pour la configuration institutionnelle de demain pour peu que la fraude soit « contenue dans les limites qui ne faussent pas trop les choix des Algériens », appelant les démocrates à se mobiliser pour protéger les urnes. « Revaloriser le pouvoir local est réaliste parce que, malheureusement, nous savons que pour l'immédiat la démocratisation par le sommet est aléatoire », argumente le leader du RCD. Sur un autre volet, il indique que l'Algérie n'a pas besoin, pour l'heure, d'une autre constitution, dès lors que la question cruciale se pose au niveau du respect des lois par les dirigeants. Pour le docteur Sadi, sans la refondation de l'Etat, toutes les autres réformes seront peine perdue. Il faut rappeler, enfin, que le congrès du RCD se tiendra les 16 et 17 novembre.