Encore une rentrée sur fond de grogne à l'université Abderrahmane Mira de Béjaïa. Après une tumultueuse année 2104/2015, marquée, rappelons-le, par un âpre bras de fer entre les étudiants exclus et l'administration, celle-ci est désormais en conflit avec les enseignants de la faculté des sciences exactes. Ces derniers lui contestent sa décision de délocalisation de leur faculté de Targa Ouzemmour vers le nouveau campus d'Amizour, jugé «inapproprié». Mardi, plus d'une centaine d'enseignants de la faculté des sciences exactes ont marché dans le campus Targa Ouzemmour pour s'opposer à cette décision qu'ils considèrent comme «unilatérale» et «méprisante». Ceci après avoir gelé les examens de rattrapage qui devaient se dérouler du 3 jusqu'à la fin du mois en cours. Pour rappel, le conseil de direction de l'université s'est réuni le 27 juillet dernier et a opiné à la délocalisation de la faculté des sciences exactes vers le nouveau campus d'Amizour. Cette décision validée par le Conseil scientifique deux jours plus tard devrait permettre à la faculté des sciences exactes qui regroupe les filières mathématiques, physique, chimie et recherches opérationnelles (RO) «de meilleures perspectives de développement». «Il n'en est pas question», s'opposent les enseignants, estimant que cette mesure signe «la mise à mort» de la faculté des sciences exactes. Séparation anti-pédagogique Leurs arguments concernent les volets pédagogique, scientifique et économique. «D'abord, les facultés de sciences exactes et de technologie sont complémentaires et doivent rester l'une près de l'autre, à l'image de l'USTHB, USTO, ou encore l'Académie des sciences technologiques d'Alger. Leur séparation est anti pédagogique», s'indigne M. Bibi, enseignant de mathématiques. «Ce campus destiné en principe pour la faculté de droit ne dispose ni de labos ni d'unité de calculs intensifs, ni d'un plateau technique. Il est complètement en porte-à-faux avec nos besoins», déplore, pour sa part, Mohammed Meziani, enseignant au département de physique. «Ce n'est qu'après avoir essuyé un refus des étudiants et enseignants des facultés de droit et sciences sociales que l'administration s'est tournée vers nous comme par mépris», révèle l'enseignant. Economiquement, dénoncent encore les enseignants, cette délocalisation rime avec gaspillage. «Notre faculté compte à peine 4000 étudiants et 200 enseignants. Nous serons obligés d'occuper des amphis de 450 places avec des sections d'à peine 150 étudiants. C'est une entrave technique en plus d'être du gaspillage», relève M. Bibi, soulignant que sa faculté était sur la bonne voie si cette mesure n'était pas venue la chambouler. En effet, la faculté des sciences exactes est, depuis 2007, une faculté à part entière, après avoir évolué depuis sa création en 1995 en tant qu'Institut de sciences exactes rattaché à la faculté de technologie. En 2012, sa dotation en laboratoires, blocs d'enseignement et places pédagogiques semblait la destiner à s'implanter définitivement à Targa Ouzemmour. Ceci a été fait de surcroît, explique M. Bibi, en conformité avec l'idée de ne pas la séparer de la faculté de technologie. Intervenant, mercredi dernier, sur les ondes de la radio locale, le recteur, Boualem Saïdani, a réitéré l'argumentaire de son administration quant à cette délocalisation. «Perspectives de développement» «Cette année, le campus Targa Ouzemmour qui accueillait 16 000 étudiants en 2104/2015 pour 13 000 places pédagogiques, en accueillera 20 000», révèle le recteur. «Si nous avons opté pour la faculté des sciences exactes pour enrayer cette surcharge, c'est qu'il est impossible de délocaliser la faculté de technologie qui compte 11 000 étudiants ou celle des sciences naturelles et de la vie dont les besoins pédagogiques ne sont pas assurés au niveau du nouveau campus», argumente le recteur. Selon le responsable, «le campus d'Amizour est idéal pour accueillir la faculté des sciences exactes. Il dispose de 4100 places pédagogiques, 750 places de bibliothèque et 500 autres de laboratoire, et nous travaillons pour combler les lacunes». Comme pour rassurer les contestataires, le recteur affirme que «le campus d'Amizour compte dix laboratoires en phase d'achèvement» et que «30% des étudiants de la faculté des sciences exactes n'ont besoin que d'outil informatique qui est déjà disponible». M. Saïdani souligne, en outre, que le déménagement se fera progressivement et que seulement l'essentiel de cette faculté devra partir, certains départements pouvant rester sur place dans un premier temps. Se disant ouvert au dialogue avec les enseignants contestataires, le recteur estime que cette délocalisation fait partie du projet de restructuration de l'université qui offre «des avantages et des perspectives de développement à la faculté des sciences exactes».