En Turquie, un dirigeant de l'AKP a également dénoncé «les négligences» des Saoudiens et proposé que son pays organise le hadj, car «les Lieux Saints de l'islam appartiennent à tous les musulmans». Les critiques fusent de toutes parts sur les conditions de sécurité du pèlerinage à La Mecque, après la bousculade qui a coûté la vie à 717 pèlerins et blessé 863 autres à Mina, le drame le plus meurtrier à endeuiller le hadj depuis 25 ans. Le hadj a été particulièrement meurtrier cette année : l'effondrement d'une grue le 11 septembre sur la Grande Mosquée, à La Mecque, avait déjà fait 109 morts et quelque 400 blessés. Les autorités saoudiennes ont promis une enquête «rapide et transparente» et le roi Salmane a aussitôt ordonné un «réexamen» de l'organisation du hadj, vivement critiquée par des fidèles qui, sous le choc, disaient avoir peur de poursuivre leur pèlerinage. Soucieux d'accomplir leur hadj malgré tout, des fidèles se sont adonnés au rituel qui consiste à jeter des cailloux en direction de trois stèles symbolisant Satan, selon la tradition musulmane. L'Iran, qui a déploré la mort de 131 de ses pèlerins dans la bousculade, a dénoncé avec véhémence des failles dans le système de sécurité mis en place par l'Arabie Saoudite. Depuis New York où il doit participer à l'Assemblée générale de l'ONU, le président iranien Hassan Rohani a ainsi demandé au «gouvernement saoudien d'accepter ses responsabilités» dans cette catastrophe. Après la prière du vendredi à Téhéran, des fidèles ont par ailleurs manifesté pour dénoncer un «régime malveillant et incompétent», selon un communiqué du Conseil qui organise les manifestations officielles. «L'Arabie Saoudite est incapable d'organiser le pèlerinage», a déclaré l'imam qui menait la prière, l'ayatollah Mohammad Emami Kashani. Gestion catastrophique Face aux drames récurrents qui frappent le pèlerinage, les autorités iraniennes ont même exigé, hier après-midi, d'être associées à l'enquête que compte ouvrir Riyad. «Des pays comme l'Iran, qui ont beaucoup souffert, doivent avoir leurs représentants dans l'enquête pour déterminer les causes de la catastrophe et obtenir la certitude que cela ne se reproduira pas», a déclaré le premier vice-président iranien Es-hagh Jahanguiri à la télévision d'Etat après une réunion extraordinaire du cabinet. «Il n'y a aucun doute sur la mauvaise gestion et le manque d'expérience des responsables (chargés de l'organisation du pèlerinage sur place, ndlr). Le gouvernement saoudien est responsable et doit en répondre», a-t-il ajouté. Pis encore, le responsable de l'Organisation iranienne du hadj, Saïd Ohadi, cité par les agences iraniennes, accuse les Saoudiens de cacher la réalité à l'opinion sur l'ampleur du drame. Il a affirmé qu'en réalité, «quelque 1500 personnes ont été tuées dans la catastrophe». Il n'a pas exclu que jusqu'à 2000 pèlerins aient péri. Selon lui, «365 pèlerins iraniens manquent toujours à l'appel mais cela ne veut pas dire qu'ils sont forcément morts». L'Iran a annoncé officiellement le décès de 131 de ses ressortissants. Téhéran a demandé au gouvernement saoudien de «coopérer immédiatement pour permettre le transfert des corps des pèlerins tués», selon le site de la télévision d'Etat. En Turquie, un dirigeant du parti islamo-conservateur, au pouvoir à Ankara, a également dénoncé les «négligences» des Saoudiens et proposé que son pays organise le hadj car «les Lieux Saints de l'islam appartiennent à tous les musulmans» Les critiques turques Mais le président turc, Recep Tayyip Erdogan, a pris la défense de Riyad en se dissociant des «déclarations hostiles à l'Arabie Saoudite». A rappeler que les Iraniens ont, de nombreuses fois aussi, soutenu l'idée d'une gestion internationale des Lieux Saints. Aussi bizarre que cela puisse paraitre, le souverain saoudien Salmane a, lors d'une allocution télévisée, hier, complètement passé sous silence la bousculade de Mina. Cette allocution a été donnée au moment où il recevait les chefs des délégations officielles des pays islamiques au hadj. Alors que Riyad n'a pas encore fourni un décompte par nationalité des victimes de la bousculade, certains gouvernements ont fait état du nombre des pèlerins décédés comme l'Algérie (3), l'Inde (14), l'Egypte (14), le Pakistan (7) ou le Cameroun qui en a recensé «une vingtaine». Près de deux millions de fidèles, dont 1,4 million venus de l'étranger, ont participé au pèlerinage de cette année qui s'achève aujourd'hui. Selon le témoignage de nombreux hadjis, l'organisation du pèlerinage de cette année est une « catastrophe». A. Z.